Le 20 mars 1970, 26 pays, partiellement ou entièrement de langue française portèrent aux fonts baptismaux, à Niamey, l’Agence de Coopération Culturelle et Technique (ACCT). La Coopération culturelle était alors le noyau dur de l’initiative des pères fondateurs à l’origine de cette belle initiative.
A l’issue de plusieurs mutations, l’ACCT, deviendra en 2005 l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Au diapason de l’évolution mondiale en matière de pluralisme politique et d’émergence d’organisations de la société civile de défense de droits humains, ce changement d’appellation ira de pair avec l’élargissement de ses compétences et l’amélioration de son mode de fonctionnement. C’est ainsi que l’OIF s’occupera désormais des questions de paix, de démocratie, des droits de l’homme, de développement durable, de technologies numériques, en plus de la culture et de l’éducation.
C’est donc avec un réel plaisir que nous accueillons aujourd’hui Madame Louise Mushikiwabo, Secrétaire Générale de l’OIF dont le dynamisme et l’engagement donnent encore plus de pertinence et d’actualité au rôle de cette Institution. La brillante présentation qu’elle vient de nous faire, de même que celle de Madame Bintou Keita, Sous-Secrétaire Générale, sont la preuve s’il en était besoin de la complémentarité qui existe entre l’Organisation des Nations Unies et l’Organisation Internationale de la Francophonie.
Je voudrais aussi saluer la participation à ce débat de S.E.M. Zohrab Mnatsakanyan, Ministre des Affaires Etrangères de l’Arménie, Président de la Conférence des Ministres de l’OIF. Je voudrais me féliciter de l’heureuse coïncidence de ce débat avec l’utilisation pour la première fois de la plateforme d’interprétation qui permet le retour du multilinguisme au sein du Conseil.
Il convient de le souligner, la coopération entre les Nations Unies et les Organisations régionales et sous-régionales, en matière de paix et sécurité, trouve son fondement dans le chapitre VIII de la Charte de l’ONU qui consacre le principe de subsidiarité et des avantages comparatifs entre organisations partenaires.
C’est dans ce cadre que s’inscrit la coopération entre les Nations Unies et l’Organisation internationale de la Francophonie, notamment sur l’importance des mécanismes d’alerte précoce et de prévention des conflits, du maintien de la paix, de la consolidation de la paix et du soutien aux réseaux de femmes et de jeunes impliqués dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix. Deux domaines illustrent de façon éloquente, la complémentarité qui existe entre les deux Institutions.
Il s’agit en premier lieu, de la diplomatie préventive que mène l’OIF pour anticiper les risques de crises, à travers la veille et l’échange d’informations avec les partenaires internationaux ; faciliter le dialogue à travers la médiation et les bons offices ; soutenir la mise en œuvre d’accords politiques et de paix ; réformer ou renforcer les institutions nationales en période de transition, y compris en soutenant la gouvernance démocratique des systèmes de sécurité.
Il s’agit en second lieu, d’accompagner les processus électoraux pour la sortie de crises et la consolidation de la démocratie, contribuant ainsi à l’établissement d’un environnement stable et apaisé, dans l’espace des 88 pays membres et de promouvoir des processus électoraux libres, crédibles et transparents, à travers des dispositifs juridiques, institutionnels et techniques.
Ce faisant, l’OIF participe à la mise en œuvre des Objectifs de développement durable des Nations Unies, notamment la cible qui vise la mise en place d’institutions efficaces, responsables et transparentes à tous les niveaux. La coopération que dé veloppe l’Organisation internationale de la Francophonie avec les Nations Unies, dans le domaine du maintien de la paix, trouve son fondement dans la Charte de l’Organisation, adoptée en 1997, lors du Sommet de Hanoï.
La Charte, en disposant que « la francophonie, consciente des liens que crée entre ses membres le partage de la langue française, souhaite les utiliser au service de la paix », a invité les Etats francophones à s’investir dans les questions relatives à l’instauration, au maintien et au renforcement de la paix et de la sécurité internationales.
Ainsi, la question de la participation des pays francophones aux opérations de paix des Nations Unies, posée de manière spécifique depuis les années 2000, s’articule autour de deux problématiques : d’une part, la hausse significative du nombre d’opérations de paix menées dans les pays francophones et, d’autre part, le volume relativement faible des effectifs déployés par les Etats francophones, pour contribuer à ces opérations.
A cet effet, la Francophonie, en étroite coopération avec le Département des opérations de paix des Nations Unies, mène des actions de plaidoyer auprès de ses membres et accompagne au plan politique et technique, la montée en puissance des capacités francophones de maintien de la paix ; promeut le multilinguisme, notamment l’usage du français, dans les Opérations de paix ; contribue à la diffusion des normes et procédures onusiennes en français, y compris les procédures de recrutement, afin de promouvoir les candidatures de personnels francophones au sein des Opérations de paix, notamment des femmes.
Par ailleurs, en ce qui concerne la consolidation de la paix, l’Organisation internationale de la Francophonie joue un rôle majeur, en ce sens qu’elle contribue à la prévention et à la gestion des conflits et qu’à l’accompagnement des transitions.
A ce propos, elle poursuit une double finalité : celle sécuritaire, en renforçant la paix, par la mise en œuvre de dispositifs de prévention et de gestion des conflits, et le soutien aux acteurs nationaux dans leurs efforts d’intériorisation des mécanismes de résolution pacifique des différends et une finalité politique, en promouvant l’approche de prévention des crises, propre à la Francophonie, de même qu’en concrétisant l’engagement de la Francophonie dans la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent, aux côtés des acteurs nationaux et multilatéraux, en vue de garantir la stabilité dans son espace.
A cet effet, elle contribue à l’atteinte des Objectifs de développement durable des Nations Unies, à savoir la cible, qui consiste à appuyer les institutions nationales chargées de renforcer les moyens de prévenir la violence et de lutter contre le terrorisme et la criminalité, en particulier dans les pays en développement.
Il y a lieu de rappeler que, l’Organisation Internationale de la Francophonie est pionnière, en matière d’implication des femmes et des jeunes dans la prévention des conflits et la consolidation de la paix.
Conformément à l’Accord-cadre du 12 mai 2012, l’OIF et ONU-Femmes, ont jugé indispensable d’instaurer un dialogue institutionnel entre les gouvernements, les partenaires et les acteurs au sein de leurs réseaux et organes respectifs, en vue de promouvoir l’autonomisation des femmes et l’égalité des sexes au sein des Etats et gouvernements, membres de la Francophonie.
Cette coopération a permis l’organisation, à Abidjan, en 2016, du séminaire international pour la promotion de la participation des femmes aux processus de paix, dont les recommandations furent, entre autres, l’investissement et le soutien pour la formation des femmes en matière de prévention des crises et de diplomatie préventive ; la formation et l’apport d’un soutien technique et financier aux organisations de femmes afin qu’elles participent à la négociation des accords de paix et leur suivi ; le renforcement du rôle des femmes dans les parlements, à travers des formations sur les techniques de prévention et de gestion des conflits ; l’intégration des femmes dans le développement et la mise en œuvre de programmes sur la prévention et la réponse à la radicalisation, l’extrémisme violent et le terrorisme.
Par ailleurs, en application de la résolution 2250 (2015) des Nations Unies sur l’agenda jeunesse, paix et sécurité, l’OIF a lancé l’appel à initiatives francophones « Jeunes, Paix et Sécurité ».
Au plan stratégique, cet appel vise à mobiliser, sur les cinq continents que couvre l’espace francophone, la jeunesse francophone en appui à la dimension prévention de cette résolution. De manière spécifique, il consiste, entre autres, à renforcer la résilience de la jeunesse francophone et à consacrer son rôle d’agent de changement et de promotion de la paix ; favoriser le développement et valoriser des organisations de jeunes de la société civile francophone, travaillant sur les questions de jeunesse et de paix.
Je voudrais pour conclure, réitérer l’attachement du Niger aux principes et idéaux incarnés par l’OIF et saluer le rôle éminemment positif joué par Madame la Secrétaire Générale et les autres instances de la Francophonie, dans la promotion et la protection de ces idéaux de paix, de défense des droits de l’homme, de promotion de la bonne gouvernance et de la démocratie. Face à tant de réalisations et d’acquis, comment ne pas rendre un hommage appuyé aux Pères fondateurs de la Francophonie institutionnelle que sont les Présidents, Diori Hamani du Niger, Habib Bourguiba de la Tunisie, Léopold Sédar Senghor du Sénégal et Prince Norodom Sianouk du Cambodge, grâce à la vision et à la clairvoyance desquels, nous avons hérité de cet outil de coopération et de solidarité entre les peuples.
Je vous remercie ! ».