Mr le secrétaire général à quelques battements d’ailes, l’USTN fêtera ses 60 ans d’existence. Qu’elle est la genèse de cette union et qu’est ce qui a été concrètement entrepris à l’endroit des travailleurs par rapport à sa devise « la défense des intérêts matériels et moraux».
Merci de m’avoir donné l’opportunité de parler de l’USTN dans les colonnes de votre auguste journal aussi légendaire que notre organisation. L’USTN est héritière de l’Union Générale des Travailleurs d’Afrique noire créée en 1957 à Cotonou par les leaders de la lutte pour l’indépendance des pays d’Afrique francophone. Au lendemain des indépendances toutes les centrales syndicales furent reconstituées sous forme d’organisation unique rattachées au parti politique au pouvoir. Au Niger, il fut créé le 25 septembre 1960 l’Union Nationale des Travailleurs du Niger (UNTN). Les responsables syndicaux étaient en même temps membres du Bureau politique du parti au pouvoir ; ce qui explique la conduite syndicale dite de syndicalisme d’intégration. A la chute du régime du parti unique suite au coup d’Etat militaire de 1974, les responsables syndicaux tombent en disgrâce. La nouvelle génération, sous la pression des militaires au pouvoir, décide de changer de ligne politique et adopte le syndicalisme de participation responsable.
En 1976, la centrale change de dénomination et devient l’Union des Syndicats des Travailleurs du Niger pour des raisons organisationnelles. Cette conduite syndicale sera maintenue jusqu’en 1987 avec la disparition du Général Président, à qui succède un autre militaire cette fois débonnaire qui proclame la politique de décrispation.
L’USTN a donné naissance à plusieurs centrales syndicales, pourtant au sortir des élections professionnelles elle s’est retrouvée en 3ème position au lieu de la première ; le commun des mortels a des difficultés à comprendre cette mésaventure et se demande les mobiles ?
L’USTN est la centrale syndicale qui a revendiqué l’organisation des élections professionnelles pour mettre de l’ordre dans le monde des organisations syndicales créées depuis l’avènement de la démocratie dont elle a aussi été un acteur majeur dans son instauration. On a ainsi assisté depuis un certain temps à la création des organisations syndicales tout comme des partis politiques pour la plupart des cas liés à des intérêts personnels. Nous avons activement participé à l’organisation de ces élections et nous nous félicitons des résultats pour d’une part l’avancée qu’a enregistrée notre pays dans ce domaine, mais aussi la place de notre centrale sur l’échiquier syndical national. Les raisons pour lesquelles nous occupons la troisième place nous les connaissons, nous les gardons pour nous en vue de préparer les prochaines élections.
Est-ce la résultante de la fin de la lune de miel qui aurait caractérisé les relations entre l’USTN et le pouvoir ?
Il n’ya jamais eu de lune de miel entre l’USTN et le pouvoir, il faut plutôt vous référer aux différents ouvrages sur l’histoire de l’USTN écrits par d’éminentes personnalités. Ainsi que les différentes déclarations et prises de position de l’USTN.
D’aucuns disent que la colonne vertébrale syndicale de l’USTN malgré qu’étant la centrale mère reste toujours la même : ateliers, séminaires, colloques tout comme les autres centrales. Mais à quand l’USTN doit- elle se démarquer de ce cliché syndical pour une autre stratégie de formation ?
La formation est l’une des principales fonctions syndicales. Toute organisation qui ne met pas à jour les connaissances de ses membres est appelée à disparaitre. Autant les travailleurs sont appelés à faire valoir leurs droits à la retraite, autant nous sommes tenus de renouveler les dirigeants syndicaux par les jeunes générations. Donc il faut les former il n’y a rien à faire puisqu’on ne peut pas réinventer la roue.
Toujours les mêmes revendications, condamnations… qui laissent visiblement indifférent le pouvoir, et la centrale qui ne réagit point, même en cas de non satisfaction de quelques points contenus dans le cahier de doléances. Monsieur le Secrétaire Général à quand la fin de ce théâtre syndical pour une véritable prise de conscience ?
La ligne politique de l’USTN est le « syndicalisme de développement», donc nous continuons à négocier et renégocier tant que le partenaire ne ferme pas la porte avant de faire recourt à l’arme ultime. Et puisque l’injustice ne finira pas totalement sur notre planète, les syndicats n’ont pas le droit de disparaitre. La prise de conscience sera effective lorsqu’il y’aura un ras-le-bol généralisé et que les travailleurs comprendront que la division ne les arrange pas.
Si tous les syndicats affiliés (une cinquantaine) s’acquittent de leurs cotisations, l’USTN aura-t-elle besoin d’une quelconque subvention de l’Etat et d’autres appuis des partenaires ?
Même si tous les affiliés payent régulièrement leurs cotisations, l’USTN aura toujours besoin de l’appui de tous ses partenaires ; c’est d’ailleurs un devoir pour eux d’appuyer les partenaires sociaux. Il y’a trop de choses à faire aux syndicats donc beaucoup de moyens sont nécessaires.
A l’heure actuelle qui finance l’USTN ?
L’USTN est financée tout naturellement par ses affiliés, l’Etat et les partenaires extérieurs.Mais aussi à travers certaines activités non négociantes menées çà et là.
En 60 années d’existence, l’USTN évolue dans le même bâtiment. Ce qui n’honore pas d’ailleurs, partenaires et autres visiteurs étrangers, vous avez un mot?
Nous nous estimons heureux d’avoir ce patrimoine que certains syndicalistes après avoir créé leur centrale ont pensé que l’USTN devrait le partager avec eux. L’USTN est la seule à posséder des bâtiments et terrains à travers tout le pays. Nous sommes en train de réfléchir à la construction d’un nouveau siège et même la mise en valeur des autres terrains à l’intérieur du pays.
Visiblement le monde féminin des travailleuses ne s’occupe que des femmes intellectuelles en milieu urbain, et les autres travailleuses qu’en dites-vous ?
Là je réponds que c’est une affirmation gratuite car à l’USTN nous avons avec nos partenaires un projet pour le secteur informel où se retrouvent les femmes de toutes les couches socioprofessionnelles. Le seul problème est que le syndicalisme est avant tout une question d’engagement et de disponibilité. Ceci est valable aussi bien pour les femmes que pour les hommes. Lorsque quelqu’un n’est pas engagé à faire quelque chose personne ne peut l’obliger à le faire encore moins à sa place. Les femmes sont confrontées aussi à d’autres problèmes notamment la stigmatisation liée aux coutumes surtout lorsqu’elles sont mariées. Pour pallier à tout cela, nous sommes obligés de mener des campagnes de sensibilisation.
Comment peut-on qualifier vos rapports avec les autres centrales que l’USTN a accouchées ?
Nos rapports avec les autres centrales sont bons puisque l’USTN en tant que centrale mère comme vous le dites, nous n’avons aucun complexe de tout mettre en œuvre pour rassembler tous les acteurs pour une unité d’action pour le bien être des travailleurs.
Correspondance particulière Dubois Touraoua