Depuis 2013, la région de Diffa a été minée dans ses efforts de développement par une situation de crise humanitaire qui a généré des conflits, des exactions et autres actes terroristes, occasionnant le déplacement de 302 387 personnes dont 184 404 déplacés internes, 88 668 réfugiés et 29 315 retournés. Les conséquences de cette situation tendue se caractérisent notamment par :
Une rupture de la confiance qui fonde le lien social : méfiance entre membres des familles et des communautés ; dénonciations, soupçons, restriction des activités sportives et culturelles, effritement de la parenté à plaisanterie qui constitue un des piliers de la cohésion sociale au Niger.
Une déstructuration de l’économie locale au niveau des processus de production, des marchés, de la mobilité des personnes et des biens, des AGR de service, la vente en détail des hydrocarbures et pour les activités de mototaxis.
Cette situation a conduit à l’avènement d’une situation complexe de sous-emploi et de désœuvrement des jeunes devenus des proies faciles susceptibles de basculer dans des violences sociopolitiques et religieuses. Malgré une présence importante des forces de sécurité dans le cadre de l’état d’urgence, les angoisses et les tensions restent perceptibles dans les sphères de moins en moins transparentes des relations entre les personnes et entre les communautés.
Le retour de la paix dans la région de Diffa se présente alors comme étant l’une des préoccupations majeures du gouvernement nigérien. Ainsi, pour soutenir les efforts du gouvernement nigérien et les initiatives des acteurs locaux en vue d’un retour rapide au calme et à la stabilité dans la région de Diffa, les partenaires de l’Etat dont les ONG CARE International, Plan International et Aide et Action International avec les partenaires locaux KARKARA, AREN et NIGETEC ont élaboré le Projet Jeunesse Diffa. Cela dans le but de renforcer et consolider la cohésion sociale, la paix et le développement socio-économique.
Financé par l’Agence Française de Développement (AFD) en collaboration avec l’Etat du Niger à travers la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix (HACP) et mis en œuvre par un consortium de trois (3) ONG internationales (CARE International, Plan International et Aide et Action International) épaulées par leurs partenaires locaux KARKARA, AREN et NIGETEC, le Projet Jeunesse Diffa couvrant les douze communes de la région permettra d’améliorer les conditions de vie des jeunes à travers la restauration de la paix et le renforcement de la stabilité sociopolitique et économique de la région. Tandis que le consortium met en œuvre les composantes 1 et 2 du projet qui en compte 3, la HACP et le Conseil Régional de Diffa, eux, se chargent de la mise en œuvre de la 3ème composante.
Prévu pour durer quatre (4) ans, le PJD arrive à sa fin. Des témoignages recueillis auprès des cadres et des bénéficiaires de ce projet, il s’en suit un constat de grande satisfaction.
Ă quoi se résument les activités du projet ?
El Hadj GONI Malam Salé Coordonnateur, PJD-BANA a indiqué qu’en termes d’activités, le consortium a organisé son intervention autour d’une cinquantaine d’activités qui ont été organisées dans cinq piliers stratégiques majeurs qui sont interconnectés. Le premier pilier concerne les activités de création d’espaces récréatifs (culturels et sportifs) où on accompagne les jeunes en les structurant, en les équipant, en les aidant à organiser des compétitions culturelles et sportives. On accompagne également les services techniques dans le sens justement de l’appui institutionnel en vue d’accompagner les jeunes dans leurs communes. Le deuxième pilier s’intéresse à la création de possibilité pour les jeunes d’acquérir des ressources à travers des activités de haute intensité de main d’œuvre autour desquelles nous mettons des groupements d’épargnes et de crédits qui leur donnent la possibilité de se faire de petits crédits et de pouvoir prendre en charge certains de leurs besoins. Et en même temps, nous assurons la formation du comité de gestion. Le troisième pilier s’intéresse à la formation professionnelle initiale comme de perfectionnement. C’est 1.500 jeunes que nous allons atteindre et ces jeunes seront formés en vue d’une insertion socioprofessionnelle à travers le quatrième pilier. Là, nous travaillons beaucoup avec les plates-formes d’orientation pour amener les jeunes à découvrir les métiers les plus porteurs et à les orienter vers les métiers d’avenir. Le cinquième pilier est transversal aux quatre premiers piliers et c’est là où on travaille sur les questions de bonne gouvernance, de citoyenneté. Nous avons organisé beaucoup de compétitions intercommunales où on crée des espaces de discussion entre les jeunes et leurs communes. Dans la démarche, on a défini une stratégie d’entonnoir où il y’a des piliers à l’intérieur desquels le maximum de jeunes sont formés et les autres en plus petits nombres sont accompagnés dans la création de leurs entreprises.
Dans quel climat s’est déroulée l’exécution des activités du PJD ?
Issaka ABDOU ALI, SG/Conseil Régional de Diffa explique au départ il y’a eu une mauvaise communication sur le programme. On a fait croire aux jeunes que le Programme Jeunesse Diffa allait effectivement résoudre tous les problèmes de la jeunesse de Diffa. Aussi il y’a l’offre du PJD qui est en deçà de la demande de la jeunesse de Diffa de façon qualitative et quantitative. Les jeunes pensaient que c’est de l’argent qu’on allait mettre à leur disposition. L’appel que nous lançons à l’endroit de la jeunesse de Diffa est de s’approprier les résultats de ce programme qui constitueront un argumentaire pour le Gouvernement, les collectivités et d’autres partenaires pour chercher des financements semblables pour améliorer la qualité de vie de la jeunesse dans la région de Diffa.
Quels sont les résultats obtenus à travers le Projet Jeunesse Diffa ?
ABDOULKADRI Hadjaratou, Chargée du suivi-évaluation PJD/CARE a estimé que les résultats atteints par le Projet Jeunesse Diffa sont liés aux activités menées autour des cinq piliers stratégiques. Ainsi, 57 associations culturelles et sportives ont été mises en place et équipées. Ce qui a permis au projet de toucher 2.965 jeunes. Dans le cadre des travaux HIMO, 3.000 jeunes ont été touchés à travers diverses activités notamment, l’hygiène et l’assainissement, la construction d’infrastructures et les CSDRS. Dans le cadre de la formation professionnelle 801 jeunes ont été touchés ainsi que la construction de dix blocs d’ateliers dont 4 à N’Guimi, 4 à Goudoumaria et 2 à Mainé Soroa. Il y’a aussi la dotation en groupes électrogènes des 5 Centres d’Enseignements Techniques des départements. La dotation en matière d’œuvres et équipements dans les 20 Centres de formations professionnelles. Il y’a aussi la construction et l’équipement de deux plates-formes jeunesse dont une à Bosso et une autre à N’Gourti. En outre, 2.860 jeunes ont également été touchés dans le cadre de la formation sur la bonne gouvernance, la citoyenneté et la gestion des conflits, l’alphabétisation fonctionnelle, les activités de plaidoyer et de sensibilisation.
En quoi les actions du PJD ont-elles aidé à améliorer les rapports entre les institutions de l’Etat et les administrés ?
DALLA Korodji, Président Conseil Régional de Diffa a souligné que le Conseil Régional a dans la période de sa gestion contribué substantiellement à la réalisation de ce programme. La population sait que le Conseil Régional est l’une des structures légales qui puissent contribuer à son développement économique et social. Nous avons cette confiance pour une période de 5 ans et nous allons agir en tant que représentants légitimes de la population dans toutes ses actions économiques et sociales que nous portons.
Quel est l’apport du PJD dans le renforcement de la conscience citoyenne des jeunes ?
Illiassou Saley Kanta, Vice-Maire Foulatari, Conseiller Régional : a i ndiqué que les jeunes de Diffa constituent aujourd’hui un levier pour la cohésion sociale grâce à l’intervention du Projet Jeunesse Diffa (PJD). Ce projet a été initié en faveur des jeunes et je fais partie des premiers jeunes qui ont débuté avec ce projet et qui ont beaucoup participé à des formations sur la citoyenneté et la cohésion sociale. La preuve en est que grâce à ses formations que nous avons reçues, je suis aujourd’hui élu Vice maire et conseiller régional. Quand on prend globalement dans la région de Diffa presque les 7 communes sont dirigées par des jeunes et çà grâce aux efforts du PJD à travers les formations. Nous pensons qu’aujourd’hui, les jeunes constituent un levier pour la consolidation de la paix grâce à ce projet.
Mato Adamou, ONEP Diffa