Une équipe de journalistes a séjourné dans le département de Tessaoua (région de Maradi) le 27 juillet 2023 afin de voir les réalisations et les résultats obtenus dans le cadre de l’initiative MUSKOKA, un programme qui vise la réduction de la mortalité et la morbidité maternelle, néonatale et infanto-juvéniles dans la région. Parmi les multiples actions menées, figure l’approche ‘’Livraison au dernier kilomètre’’, une approche qui a permis d’assurer la disponibilité des molécules et d’améliorer la fréquentation des centres de santé.
L’initiative MUSKOKA est née lors du sommet G8 de 2010 qui s’est tenu à Muskoka au Canada. Au cours de ce sommet, il a été décidé d’appuyer la mise en œuvre d’un groupe d’interventions de santé à haut impact dans neuf pays à faible revenu dont huit pays d’Afrique et le Haïti.
Le fonds français Muskoka poursuit trois objectifs, à savoir, contribuer à la réduction de la mortalité et de la morbidité maternelle, néonatale et infanto-juvénile ; garantir l’accès des adolescents aux droits et à la santé sexuelle et reproductive ; améliorer la nutrition et promouvoir l’autonomisation des femmes grâce à la mise en œuvre d’interventions intersectorielles à haut impact, dans le cadre de la continuité des soins.
L’initiative MUSKOKA touche les régions de Maradi, Zinder, Dosso et Tahoua avec toutefois des interventions concernant d’autres régions, en fonction des priorités de certaines années. Les acteurs de mise en œuvre au niveau du gouvernement, sont le Ministère de la Santé Publique, de la Population et des Affaires sociales ; le Ministère de la Communication et le Ministère de la Promotion de la Femme et de la Protection de l’Enfant. Les Agences des Nations Unies partenaires du Fonds Français MUSKOKA sont l’UNFPA, l’UNICEF, l’ONS et ONU Femmes.
Ce fonds a permis d’améliorer, de manière substantielle, les résultats sur plusieurs aspects. Au niveau de la santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant, l’on note l’amélioration de la qualité de l’accouchement, celle de l’accès et de la qualité des soins, l’accès aux médicaments essentiels et des produits de santé. Sur le plan de la planification familiale, il y a eu la mise en place de trois stratégies pour accroitre l’accès aux services de contraception. Sur le plan de la nutrition maternelle et infantile il y a eu un appui à la promotion des pratiques d’alimentation du nourrisson et du jeune enfant et la lutte contre l’anémie chez les femmes enceintes ; l’organisation de plusieurs campagnes de mobilisation sociale au niveau de la lutte contre les violences basées sur le genre et l’autonomisation des femmes ; la promotion de l’éducation à la santé reproductive aux adolescentes et jeunes en milieux scolaire et communautaire ; la diffusion en français et en langue nationales de la série « c’est la vie » portant sur la sensibilisation du public, suscitant des débats et réflexions sur la santé maternelle et infantile et la santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes.
D’après le Médecin chef du District Sanitaire de Tessaoua, Dr Tinao Amadou Tijani, le fonds français MUSKOKA est venu en appui des actions de l’Etat dans l’amélioration de la qualité des soins et de prise en charge de la population. « Notre district a bénéficié de l’appui de livraison au dernier kilomètre » a-t-il dit. La livraison au dernier kilomètre est une approche qui consiste à renforcer le système d’approvisionnement en médicament, en vaccin, consommables et aussi en produits de contraception au niveau de tous les centres de santé. Avant la mise en œuvre de cette approche, la disponibilité en médicaments n’était pas assurée et il y avait une insuffisance au niveau de la gestion des produits. « Maintenant avec l’approche, le dispositif est bien renforcé à travers des formations à tous les niveaux et cela a permis d’améliorer la disponibilité des molécules, des vaccins, des intrants nutritionnels, des produits de la planification familiale au niveau des différents points de dispenciation. Ce qui sous-entend que le taux de rupture a diminué » a-t-il reconnu.
La Population dispose donc de molécules au niveau des points de dispenciation et on assiste au renforcement de l’utilisation des services. Le Médecin chef du District Sanitaire de Tessaoua a indiqué qu’il y a eu dans un premier temps l’affirmation de tous les acteurs, des recrutements de gestionnaires de stocks des districts et il y a eu aussi la prise en charge de ceux qui sont chargé de transporter ces produits aux différents points. En termes de résultats, Dr Tinao Amadou Tijani a indiqué qu’avec la mise en œuvre de cette initiative, le taux de disponibilité des molécules est bien assuré. « La mise en œuvre a commencé en janvier 2021. Avant la mise en œuvre de cette initiative, le taux de rupture tournait autour de 20 %. Aujourd’hui il est de moins de 1% » s’est-il réjouit.
Pour M. Almoustapha Moungaye, le responsable du CSI Shizuko Tanigaki, cette stratégie a aidé à rompre avec la rupture des molécules essentielles surtout au niveau des cases de santé, des CSI et des relais. « Avant cette stratégie, nous tombons fréquemment en rupture de molécules. Mais avec la mise en place de la stratégie, c’est un ouf de soulagement car chaque fois que nous transmettons la commande, le district fait tout pour nous ravitailler avant la date indiquée » a-t-il précisé. Pour lui, cette approche a permis de rehausser la fréquentation des adultes et des enfants du fait que les molécules essentielles sont toujours disponibles. M. Almoustapha Moungaye a insisté sur les progrès enregistrés dans la baisse du taux de mortalité infantile car en 2023, aucun décès n’a été enregistré au niveau du centre de santé. Le responsable du CSI Shizuko Tanigaki a enfin indiqué que la disponibilité des molécules permet d’administrer les premiers soins aux malades avant de l’évacuer.
Quant au gestionnaire au district sanitaire de Tessaoua, M. Adamou Guisso Ali, il a indiqué qu’à la fin de chaque mois, le chef CSI fait le rapport mensuel de consommation qu’il envoie au niveau de la pharmacie de district. « Après avoir établi les bons de commandes, nous faisons des colis en présence des manutentionnaires et les véhicules sont pris en charge par des convoyeurs jusqu’à destination. Les produits sont acheminés dans les CSI », a-t-il fait remarquer. Pour lui, les avantages résident dans l’amélioration de la disponibilité des molécules et chaque CSI fait au moins une commande par mois. Avec le calcul des indicateurs, poursuit-il, il y a eu une amélioration, il n’y a plus de rupture, mais aussi on constate une amélioration sur le volume des commandes. Pour lui, la principale difficulté réside dans les retards de paiement au niveau de certains manutentionnaires. La seconde difficulté c’est que les livraisons au niveau de la pharmacie de district ne sont pas régulières et faute de paiement rapide, certains transporteurs ne fournissent pas leurs véhicules.
Le témoignage de Mme Ibrahim Fatchima Kaka, Sage-femme CSI Suziko Tessaoua est on ne peut plus encourageant. « L’un des avantages enregistrés réside dans la fréquentation de notre centre qui s’est accrue. Maintenant dès que leurs enfants sont malades, les femmes viennent dans notre formation sanitaire surtout avec la gratuité des soins. Il n’ya aucune rupture, nous recevons les produits à temps » a-t-elle dit.
M. Sadé Nassirou, relais communautaire du village de Dilou donne les premiers soins aux patients en matière de diarrhée, toux et autres petites maladies. « Des maladies comme l’anémie, ou certaines formes de malnutrition, nous référons les patients au niveau des CSI pour qu’ils soient pris en charge. Nous prenons en charge les enfants de 2 à 59 mois. Nous sommes ravitaillés en produits après une commande auprès du chef CSI. Avec cette stratégie, la population s’intéresse à nos produits et évite les produits de la rue », a-t-il dit, avant de se réjouir de la disponibilité des produits avec des commandes qu’ils lancent avant l’épuisement des stocks. Un avis partagé par Hajia Haoua Abdou, bénéficiaire du village de Massochi. « Au début nous faisons face à la rupture des produits, ce qui nous renvoie vers les pharmacies par terre. Maintenant, nous trouvons les produits de qualité sûre sur place et avec les infirmiers, tout se passe bien », se réjouit-elle. Pour elle, cette nouvelle donne a amélioré la fréquentation du centre de santé.
Tiémogo Amadou ANP-ONEP Maradi