Le prix du riz, cette denrée alimentaire que les Nigériens consomment tant, est le principal sujet de discussion dans les foyers et lors des regroupements dans les Fadas et dans les lieux de villégiatures. Unanimes, les consommateurs nigériens rejettent les prix de vente appliqués par les importateurs et appellent à une intensification de la production locale pour soutenir la révolution en cours pour la libération véritable du Niger. Entre la Fédération des Unions des Coopératives des Producteurs de Riz (FUCOPRI) et la société Riz du Niger (RINI), les différents acteurs de la filière rizicole demeurent confiants sur les capacités du pays à relever le défi de l’autosuffisance à moyen et long terme.
Les chiffres communiqués par les acteurs du secteur rizicole donnent le tournis. Malgré le fleuve Niger qui traverse l’ouest du pays sur une distance de 550km, le Lac Tchad au Sud-Est et des centaines de mares permanentes et semi-permanentes, le Niger ne produit qu’environ 15% de sa consommation nationale. Le potentiel est pourtant là, explique M. Mamoudou Hassan, Directeur Général de la Fédération des unions des coopératives des producteurs de riz (FUCOPRI). « Le Niger, dit-il, à un potentiel énorme de terres propices à la riziculture. On a plus de 200.000 ha disponibles pour la culture du riz mais, présentement, c’est moins de 10% de ces terres qui sont exploitées ».
Les prémices de la crise du riz que traverse actuellement le pays, fait savoir M. Issaka Bonzougou, Directeur Commercial de la RINI, sont connues bien avant les évènements du 26 juillet dernier et la prise du pouvoir d’Etat par le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie. Dès 2022, précise-t-il, on notait une surenchère sur le prix du riz, suivie d’une pénurie internationale de cette denrée dès le premier semestre de l’année 2023. Ce qui a négativement impacté les pays importateurs comme le Niger. Il s’est par contre montré confiant sur le renforcement de la production et de la transformation du riz au Niger.
L’importation du riz coûte chère à l’économie nationale qui se retrouve handicapée d’une partie de son capital d’investissement. « Chaque année, ce n’est pas moins de 226 milliards que le Niger injecte dans l’importation du riz. C’est ce que j’appelle une hémorragie financière en notre défaveur », regrette le Directeur Général de la Fédération des unions des coopératives des producteurs de riz. Il s’offusque davantage du choix porté par les opérateurs économiques et certains consommateurs sur l’importation de « vieux stocks » de riz qu’il juge inferieur aux normes nationales et surtout « peu fiable » pour la santé de la population.
Le marché intérieur et les producteurs nigériens ont été surpris par un soudain intérêt des consommateurs pour le riz local. Ce qui a mis une forte pression sur le faible stock disponible. Pourtant, la consommation du riz produit localement présente plusieurs avantages pour le pays et son économie. Il s’agit, note le Directeur Général de la Fédération des unions des coopératives des producteurs de riz, M. Mamoudou Hassan, d’une réelle opportunité pour le producteur qui sécurise ainsi son modèle économique, pour le consommateur qui profite souvent de prix attractifs, et aussi pour le pays qui bénéficie de plus d’investissements dans le secteur rizicole.
Booster au plus tôt la production locale de riz et sa transformation
La dynamique de la consommation du riz local, enclenchée il y a de cela quelques années, s’accélère aujourd’hui grâce non seulement aux difficultés d’importation, mais également à une prise de conscience globale des citoyens dans le cadre de la nouvelle marche du pays vers sa libération. M. Mamoudou Hassan a appelé le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie à investir massivement dans le développement des infrastructures hydroagricoles favorables à une riziculture intense afin de rendre cultivable les terres existantes dans le lit du fleuve et d’aménager de nouvelles structures. En outre, ajoute-t-il, la modernisation de la filière passe nécessairement par sa mécanisation.
La maitrise de l’eau, reconnait pour sa part M. Issaka Bonzougou, Directeur Commercial de la RINI, est un élément fondamental pour atteindre l’autosuffisance en riz au Niger. Cela permettra, ajoute-t-il, d’étendre la riziculture au Niger intérieur et de favoriser l’exploitation des parcelles sur toute l’année. Il appelle les autorités à multiplier ainsi la construction de mini-barrages dans les régions où le fleuve ne passe pas. « Depuis les années 1985-1986, dit-il, on parlait de CILSS et de récupération des eaux de ruissellement. Si on prend un bulldozer et qu’on creuse jusqu’à une certaine profondeur pour avoir la forme d’un fleuve, on peut faire des canaux de ruissellement et des marigots artificiels qui vont se remplir pendant l’hivernage et demeureront intarissables ».
L’adaptation des semences au changement climatique et aux types de terres à travers le pays devrait permettre d’intensifier la riziculture et d’encourager sa mécanisation. « Aujourd’hui nous avons aussi des variétés qui ont des potentiels pouvant atteindre 10 tonnes à l’hectare alors que notre rendement actuel est de 6,5 tonnes pour l’exploitation de la même superficie. Il est donc possible de booster le rendement en choisissant bien la semence appropriée », explique M. Mamoudou Hassan, le Directeur Général de la Fédération des unions des coopératives des producteurs de riz. Il affirme que le rehaussement du rendement par hectare va renforcer les activités de transformation qui vont, à leur tour, augmenter les superficies cultivées et par extension, la production.
Le Directeur Commercial de la Société Riz du Niger, de son côté, table sur l’expertise de RINI dans l’accompagnement des riziculteurs pour améliorer la production locale de riz paddy qu’elle transforme. Sa société, dit-il, achète et met à dispositions des producteurs, les intrants dont ils ont besoin pour assurer une bonne production de leurs parcelles et leur prodigue des conseils sur la qualité du riz paddy souhaitée pour être blanchi, en plus du suivi sur le rendement de chaque parcelle qui est inclue dans cette prestation.
La société RINI, plaide M. Issaka Bonzougou, a plus que jamais besoin du soutien de l’Etat à travers des subventions pour mener à bien sa mission de soutien aux riziculteurs et de transformation du riz paddy en riz blanchi. Cela permettra également à la Société Riz du Niger, ajoute-t-il, d’installer des usines de transformation au plus près des producteurs et de transformer sur place les récoltes de riz paddy pour la consommation. Il plaide également en faveur de la responsabilisation de la Société Riz du Niger dans la fixation des prix du riz transformé.
Farid Mahamadou Garba (Stagiaire)