Insuffisamment connu au Niger, le cancer de la prostate est une maladie très dangereuse et même mortelle. En 2020, environ 1.414.000 hommes ont développé un cancer de la prostate dans le monde, avec une incidence moyenne d’environ 31/10000. Au Niger, selon une étude réalisée à l’hôpital national de Zinder de janvier 2019 à janvier 2020, le cancer de la prostate représentait 3,41% de l’ensemble des consultations dans le service d’urologie, avec une incidence de 37 cas. Cependant, cette affection est tardivement diagnostiquée (à des stades avancées) dans les pays en voie de développement (comme le Niger) avec une morbidité très élevée. Et pourtant selon le spécialiste, on peut mourir plus d’autres choses que de cancer de la prostate.
Troisième cancer en termes de décès chez l’homme, le cancer de la prostate est une néo formation maligne qui se développe au dépend des cellules de la glande prostatique. Il touche les hommes à partir de 50 ans et 45 ans pour ceux qui ont des facteurs de risques, c’est-à-dire des hommes chez qui dans leur famille, soit leur frère, leur oncle ou leur père a un cancer de la prostate. Cette affection est due à des facteurs de risques dont le 1er est l’âge. Il se manifeste de plusieurs façons. Une envie fréquente d’uriner, une diminution de la force du jet de l’urine ; du sang dans l’urine et dans le sperme ; une douleur aux os, tels sont particulièrement les signes potentiels du cancer de la prostate. Cette pathologie peut aussi être due, a indiqué Dr. Amadou Saminou, Chirurgien-urologue à la clinique Magori, à certains polluants de l’environnement utilisés dans l’agriculture. A cela s’ajoute ce qu’on appelle le syndrome métabolique, c’est-à-dire les patients qui ont une hypertension artérielle. « Avec une augmentation du périmètre de l’abdomen, ce sont eux les patients qui développent plus le cancer de la prostate », a- confié Dr. Saminou. Le spécialiste de préciser qu’il existe d’autres facteurs de risques mais les plus fréquents restent l’âge, la race noire, le syndrome métabolique et la pollution environnementale.
Le cancer de la prostate se localise comme les autres cancers mais essentiellement au niveau de la prostate. Pour le localiser, a expliqué le spécialiste, il faut premièrement faire un dépistage précoce. Cependant, contrairement au dépistage en masse qui se fait dans le cadre du cancer du col de l’utérus, en ce qui concerne le cancer de la prostate, le dépistage est individuel. Il consiste pour une personne qui a l’âge de 50 ans ou 45 ans de faire un examen de toucher rectal et à doser, le PSA qui est un examen du sang qui a une valeur limite qui doit être inférieure à 4 monogrammes. « Dès que le PSA monte au-dessus de cette valeur, ça alerte et c’est à ce moment qu’on va prévenir le concerné pour faire d’autres examens approfondis pour confirmer le cancer de la prostate, notamment l’examen de radio IRM qui est le guide pour faire la biopsie de la prostate qui consiste à aller prélever un petit morceau de la prostate avec une seringue et une pince au niveau de l’anus pour aller l’analyser au laboratoire c’est ce qui permet de savoir si c’est un cancer ou pas » ajoute le praticien.
Selon Dr. Amadou Saminou, il est diagnostiqué beaucoup de cancer de la prostate. « 4 à 5 patients sur 10 qui viennent pour des problèmes de prostate ont un taux de PSA qui est anormal » a-t-il confié. Toutefois il a regretté que la pathologie soit insuffisamment connue. « Beaucoup de cancer de la prostate ne passe pas par les services d’urologie parce que les gens ne sont pas informés, ils traitent d’autres problèmes alors que c’est le cancer de la prostate, et ils ne consultent pas à temps. Ils le font à un stade très avancé ce qui fait que le diagnostic ne se fait même pas parce qu’ils ne viennent pas au service d’urologie », s’est-il plaint.
Le cancer de la prostate, il faut le savoir avec le temps, se développe pour quitter la prostate et envahir d’autres organes qui sont à côté, notamment la vessie, le rectum. Il peut aussi aller au-delà pour attaquer certains organes comme le foie, les poumons et même le cerveau. Car c’est un cancer qui attaque beaucoup les os.
Le cancer de la prostate est un cancer qui se guérit à 100% mais avec des conditions car il faut que la maladie soit diagnostiquée à temps.
« Beaucoup de patients pensent que le cancer de la prostate ne peut pas être guéri à 100% parce que les gens ne consultent pas à temps. Ils ne consultent que lorsqu’il y a des complications, c’est à dire à un stade où on ne peut rien faire pour le guérir mais tout ce qu’on peut faire repose sur le palliatif. Donc, le cancer de la prostate est curable à 100% mais il faut qu’il soit diagnostiqué à temps. Aujourd’hui, il est fort possible de mourir d’autre chose que de mourir du cancer de la prostate » a dit Dr. Amadou Saminou, avec conviction et assurance.
Le cancer de la prostate a bénéficié de beaucoup de progrès dans la médecine. Selon Dr. Saminou, le traitement est fait en fonction du stade de la progression du cancer. Si c’est une personne nouvellement diagnostiquée cancéreuse, avec un début de cancer localisé, son traitement sera une guérison à 100%. Et le traitement est une chirurgie qui consiste à enlever toute la prostate, la ‘‘prostacritomi’’ totale ou on fait ce qu’on appelle la radiothérapie qui consiste à aller avec des rayons x pour irradier la prostate et tuer les cellules cancéreuses au niveau de la prostate. Cependant, si le cancer arrive à un stade qui est plus avancé, là on ne parle pas de traitement curatif car la guérison ne sera pas à 100% totale mais on fait en sorte de diminuer sa force pour qu’il ne progresse pas. C’est dans ce cas qu’on fait l’hormonothérapie qui consiste à injecter des hormones. Il peut également être fait ce qu’on appelle l’luminothérapie, ou la chimiothérapie ou carrément hormono chimiothérapie qui est l’association des deux lorsque le cancer a évolué » affirme le praticien.
Beaucoup de cancers de la prostate ne nécessitent pas un traitement mais une surveillance
« La surveillance est comme un sur-diagnostic, c’est-à-dire un sur-traitement qui consiste à traiter des cancers qu’il ne faut pas traiter. Il y a des cas où on fait la surveillance active qui consiste à dire aux patients qui ont un cancer de la prostate que leur cancer ne nécessite pas un traitement mais qu’ils sont placés sous surveillance parce qu’il y a des critères et ils doivent revenir dans 6 mois pour de nouvelles vérifications », explique Dr. Saminou.
Poursuivant sur sa lancée, Dr. Saminou ajoute que pendant la période de surveillance, les patients ne sont pas traités, mais il faut que le patient attende à ce que le cancer soit à un stade qui nécessite un traitement. « Ça ne sert à rien de faire un traitement de prévention tant que le stade du cancer n’est pas en phase de traitement car la personne a la chance de mourir plus d’autres choses que de mourir du cancer de la prostate » a-t-il dit.
Dr. Amadou Saminou souligne que le cancer de la prostate n’empêche pas la procréation car cette maladie survient au-delà de 45 ans. « Par contre après le traitement du cancer de la prostate, certains traitements font en sorte qu’ils ne peuvent plus avoir d’enfants. Une meilleure prise en charge passe par l’amélioration des conditions pour une détection précoce et volontaire des personnes à risques mais aussi par l’amélioration des soins de support », conclut le Médecin chirurgien-urologue de la clinique Magori.
Rahila Tagou (ONEP)