Une année entière sans réseau mobile pour l’un et 2 à 4 mois pour les autres opérateurs de téléphonie mobile. C’est le calvaire que continue de vivre la population de la Commune Urbaine de Bilma qui est pratiquement privée de la communication avec le reste du monde. En ce jour 28 février 2024, encore ladite population s’est réveillée dans l’espoir d’avoir un signal, mais rien. Aucun réseau ne marche. Aucun service d’appel ne fonctionne. Une situation que les habitants de cette Commune Urbaine ne comprennent pas en ce 21ème siècle.
C’est une situation qui affecte au quotidien le fonctionnement des services mais aussi qui impacte négativement toutes les activités. Le téléphone n’est plus un luxe, mais une nécessité voire un impératif vital. Un moyen de vie indispensable. C’est pourquoi, la population de Bilma ne comprend pas cette interruption de tous les réseaux de téléphonie mobile. « Personne ne vous dira les raisons de cette interruption. On s’est réveillé et chacun a constaté que les appels ne passent pas et jusqu’à présent c’est le statu quo. La population n’a été informée de rien par rapport à ce problème », déclare un habitant.
Pour espérer passer un appel, les gens se déplacent aux alentours de la ville sur les collines, pour « chercher les réseaux ». Il faut alors monter sur une altitude d’environ 25 à 30 mètres pour avoir un peu de signal de l’un des réseaux de Dirkou. « C’est une situation inédite, incompréhensible, inattendue et inexplicable », dénonce un enseignant trouvé sur la colline cherchant à joindre un contact à Agadez pour s’informer sur les salaires. Ce jour-là, mardi 27 février 2024, ce jeune enseignant était avec le major du CSI de Bilma et un autre enseignant, tous pour la même préoccupation. Au même moment plus de 15 personnes dont des femmes ont été dénombrées sur cette colline, chacun est venu à la recherche du réseau.
« Nous sommes dans une insécurité totale », s’indigne le président du Conseil Départemental de la Jeunesse de Bilma et un autre acteur de la société civile. Le président du Conseil Départemental de la Jeunesse d’indiquer qu’à cause de cette situation, la population de Bilma est privée d’exercer son patriotisme et d’apporter son soutien au CNSP à travers le FSSP, notamment à travers le prélèvement qui s’opèrent sur les appels et les forfaits. « Nous plaidons auprès du Ministre qui est chargé de ce volet d’intercéder en faveur de la population de Bilma », ajoute Elhadji Abbagana Mahaman Chégou.
Dans un entretien qu’il a accordé, sur la question, à la radio locale, avant son départ pour la Journée des Municipalités à Diffa, le maire de la Commune urbaine de Bilma M. Abbary Kochi Maïna s’est insurgé contre cette attitude des compagnies de téléphonie mobile. « La communication est quelque chose d’indispensable sur tout le plan. Sur le plan de la sécurité, sur le plan de l’information, etc., sur tous les plans on ne peut plus vivre sans outil de communication», déclare le maire de Bilma.
Déjà enclavée du point de vue de la distance par rapport au reste des grandes localités de la région, cette partie du Niger est soumise à ce blackout sur le plan de la communication. « Cette situation fait que nous ne pouvons communiquer avec le reste des autres communes, mais aussi avec l’intérieur et l’extérieur du pays pour joindre les parents, les partenaires et la diaspora. Nous lançons un cri de cœur à qui de droit pour que cette question soit solutionnée », affirme le maire de Bilma, qui invite les opérateurs de téléphonie à être solidaires avec la population de Bilma, mais aussi pour des questions de sécurité.
Cette situation s’ajoute à d’autres préoccupations auxquelles cette population est confrontée, dont la cherté de la vie. En ville, le déplacement physique est obligatoire pour toutes préoccupations alors que le litre d’essence coûte entre 1500 et 2000 FCFA.
Ce vide est très vite saisi en opportunité par certaines personnes qui ont installé des wifi privés. Chez Bachir par exemple tous les soirs, c’est un monde fou qui se donne rendez-vous pour accéder à l’internet et passer des appels. Hommes, femmes se rendent régulièrement pour l’achat de la connexion. Les tarifs pratiqués se présentent comme suit : 500 FCFA pour 1h 30 ; 1000 FCFA 3 h30 et 7500 FCFA pour une semaine de connexion.
« C’est difficile et insupportable. Le seul moyen de sortir de cette situation, c’est d’alerter les autorités. Il faut que les autorités obligent ces opérateurs à venir résoudre ce problème. Nous sommes fatiguées. Pour communiquer un décès il faut aller à la colline. Pour avoir les nouvelles d’un malade il faut aller à la colline. Ce n’est pas tout le monde qui a les moyens d’acheter le wifi et ce n’est pas tout le monde qui a la force de monter sur la colline », confie Zara, du haut de la colline, cherchant en vain d’appeler son frère à Zinder pour une question importante de la famille.
Ali Maman ONEP/Agadez