Mon Colonel-major, voudriez-vous bien présenter l’Agence Nationale de l’Aviation Civile (ANAC) que vous dirigez et nous dire ses missions ?
Tout d’abord, je tiens à dire que la communauté internationale célèbre demain 07 décembre, la journée de l’aviation civile, date de commémoration de la Convention relative à l’aviation civile internationale. Je vous remercie donc de l’opportunité que vous m’offrez de parler de l’aviation civile dans ce contexte.
L’ANAC-Niger est une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale, de l’autonomie financière et de gestion, placée sous la tutelle du Ministre chargé de l’Aviation Civile.
Chargée de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique aéronautique nationale, l’ANAC-Niger assure, pour le compte de l’Etat, les missions de règlementation, de contrôle, de surveillance, de sûreté aéroportuaire, de sécurité de l’aviation civile, de météorologie aéronautique et de coordination en matière de transport aérien.
Elle est chargée notamment de la conception, l’élaboration, l’amendement, le contrôle et la mise en œuvre de la réglementation nationale et internationale dans le domaine de l’aviation civile. C’est à elle que revient aussi la mission de contrôle réglementaire des activités des organismes ci-après : les compagnies aériennes nationales et étrangères exerçant au Niger, les organismes de l’aviation légère et sportive, les gestionnaires des aéroports, les opérateurs d’assistance en escale, les fournisseurs de service de la navigation aérienne, les centres de formations aéronautique et les organismes de maintenance aéronautique.
L’ANAC s’occupe aussi de la négociation des accords internationaux en collaboration avec les autres structures concernées de l’Etat, de la gestion du portefeuille des droits de trafic issus des accords aériens signés par l’Etat du Niger et de la coordination et de la supervision de l’ensemble des activités aéronautiques et aéroportuaires et du suivi de l’activité des organisations internationales et régionales intervenant dans le domaine de l’aviation civile.
Quelles sont les principales réalisations enregistrées récemment par l’ANAC-Niger ?
Dans le cadre de l’affirmation de la souveraineté nationale, l’ANAC-Niger s’est engagée à rendre effectif le contrôle de l’espace aérien du Niger en coordination avec les acteurs concernés. A ce titre, il convient de relever la modernisation du système de traitement et de gestion des autorisations de survol et/ou atterrissage des aéronefs à travers l’implémentation d’une plateforme dédiée en ligne. Ladite plateforme constitue une avancée majeure mettant en interaction les services de l’ANAC-Niger avec le fournisseur des services de la navigation aérienne. Le déploiement de cette plateforme s’est réalisé par le biais des compétences nationales. Elle constitue ainsi une solution des nigériens pour les nigériens.
En outre, l’ANAC-Niger a fourni son expertise en matière d’aviation civile dans le cadre de l’organisation du Hadj 2024. A ce titre, notamment, l’ANAC-Niger a mis en place un Comité de veille aéronautique des activités de transport aérien du Hadj 2024. Ledit comité met en interaction l’ANAC-Niger, le COHO, les différents acteurs de la plateforme aéroportuaire et la compagnie aérienne chargée de l’acheminement des pèlerins afin d’assurer une bonne tenue des opérations du Hadj 2024 pour ce qui est volet transport aérien. L’ANAC-Niger a supervisé l’ensemble des opérations hadj sur la plateforme aéroportuaire par le biais notamment d’inspections en sécurité et en sûreté de l’aviation civile.
Par ailleurs, dans le domaine de règlementation, l’ANAC-Niger a poursuivi la mise en conformité de la réglementation nationale par rapport aux normes internationales dans le secteur de l’aviation civile à travers l’adoption de plusieurs textes règlementaires. Aussi, notre pays a ratifié trois conventions internationales en lien avec l’aviation civile. L’ANAC-Niger a également engagé la révision du Code de l’aviation civile afin de prendre en compte les évolutions intervenues dans le domaine depuis 2010, année d’adoption du code en vigueur actuellement.
Dans le cadre de l’amélioration de la sûreté de l’aviation civile, l’ANAC-Niger a procédé à la formation des agents des Forces de Défense et de Sécurité (FDS) affectés à l’Aéroport International DIORI HAMANI en sûreté de base, en imagerie radioscopique et en marchandises dangereuses ainsi que les agents des structures exerçant sur la plateforme aéroportuaire. L’ANAC-Niger a aussi conduit des activités de supervision et de contrôle dans les domaines de la sûreté à travers la conduite de plusieurs inspections et audits.
Dans le cadre de l’amélioration de la sécurité de l’aviation civile, l’ANAC-Niger a procédé notamment à la certification d’une (01) compagnie aérienne de droit nigérien et de l’Ecole Africaine et Malgache de l’Aviation Civile (EAMAC) selon un processus en cinq (05) phases. Elle a conduit la certification d’une autre compagnie aérienne nigérienne, au stade 3 dudit processus.
Après les évènements du 26 juillet, des sanctions ont été imposées à notre pays dans le domaine de l’aviation, quel en était l’impact et qu’en est-il à présent ?
Suite aux évènements du 26 juillet 2023, les sanctions imposées à notre pays ont eu des répercussions directes sur le secteur de l’aviation civile au Niger. Du fait de ces sanctions, un certain nombre de compagnies aériennes étrangères avaient interrompu leurs vols au départ et à destination du Niger.
Fort heureusement, avec l’appui des plus hautes Autorités de notre pays, un pont aérien a été mis en place afin d’assurer la continuité du trafic aérien à travers notamment des vols opérés par l’Armée de l’Air et par des compagnies aériennes des pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).
Aujourd’hui, la situation s’est globalement normalisée. Cependant, la compagnie aérienne AIR FRANCE n’exploite plus de vols au Niger.
Où en est-on par rapport au partenariat avec les organisations internationales du domaine et les structures sœurs ?
La coopération internationale en matière d’aviation civile joue un rôle très important dans le développement de l’aviation civile d’un pays. Ainsi, au niveau du cadre institutionnel, l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI), agence spécialisée des Nations Unies, œuvre pour le développement sûr, ordonné et durable de l’aviation civile internationale. A cet effet, elle établit les normes et pratiques recommandées. Le Niger est un Etat membre de l’OACI et a récemment pris part aux travaux de la quatorzième Conférence de navigation aérienne tenue à Montréal du 26 août au 06 septembre 2024.
Au niveau régional, notre pays est membre de la Commission Africaine de l’Aviation Civile (CAFAC) où il a occupé un poste de Vice-Président au titre de la région ouest. Suite à la levée des sanctions à l’encontre de notre pays, le Niger a repris sa collaboration avec l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), notamment à travers l’URSAC (Unité Régionale de la Supervision de l’Aviation Civile).
Concernant l’Agence pour la Sécurité de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA), il faut rappeler que le Directeur Général sortant de cette institution est un de nos compatriotes.
Concernant les autres autorités de l’aviation civile, le Niger a conclu plusieurs accords de coopération technique avec des structures sœurs, dont le dernier en date est celui conclu avec le Gabon récemment. D’autres accords sont en perspective notamment avec le Rwanda, le Togo et les Etats de l’AES.
S’agissant justement de l’AES, les Premières Journées de l’Aviation Civile (JDAC) ont été organisées à Bobo-Dioulasso au Burkina Faso, du 22 au 23 février 2024. Elles ont jeté les bases d’une collaboration fructueuse entre les pays de l’AES dans le domaine de l’aviation civile, à travers notamment la création d’une compagnie aérienne commune dont les études ont déjà été initiées.
Qu’en est-il du trafic à destination du Niger et quelles sont les compagnies qui desservent le Niger ?
L’Aéroport International Diori Hamani (AIDH) est le principal aéroport du pays. Il concentre l’essentiel du trafic de passagers et de cargos. Actuellement, beaucoup de compagnies aériennes étrangères opèrent des vols réguliers au Niger à savoir Ethiopian Airlines, Asky Airlines, Air Côte d’Ivoire, Royal Air Maroc, Tunisair, Air Algérie, Air Burkina, Turkish Airlines, Libyan Airways. Un transporteur express de fret aérien y opère également, à savoir DHL.
En plus des compagnies régulières que je viens de mentionner, plusieurs autres compagnies aériennes étrangères opèrent des vols ponctuels dans notre pays, notamment Sky Mali, Fly Oya, Aérocontractor.
Au Niger, le trafic intérieur est faible, qu’envisagez-vous pour relancer ?
En effet oui, le trafic intérieur reste faible. Le secteur de l’aviation civile au Niger est confronté à de nombreux défis qui entravent son essor. En particulier, les compagnies aériennes de droit nigérien opérant des vols intérieurs font face à des coûts d’exploitation élevés. Ce qui contribue à les fragiliser et à rendre les billets d’avion chers. Le transport aérien constitue un mode de transport adapté à notre pays. Il permet de réduire considérablement le temps pour relier les villes entre elles. Il surmonte les contraintes inhérentes aux autres modes de transport de surface notamment concernant les infrastructures (routes, rails), le relief. Compte tenu des évolutions technologiques, il représente également le mode de transport le plus sûr.
Pour relancer le trafic aérien intérieur, conformément aux orientations des plus hautes Autorités de notre pays, nous avons le projet de mettre en place une compagnie aérienne nationale viable. Pour la réalisation de ce projet ambitieux, l’ANAC-Niger, en collaboration avec les autres parties prenantes, s’active à mettre en place un certain nombre d’actions. Il s’agit notamment de la réduction des coûts d’exploitation en baissant le coût du carburant, la réduction des redevances afin de rendre les billets plus accessibles, la disponibilité des ressources humaines qualifiées en attirant les jeunes vers les métiers de l’aviation civile.
Pensez-vous que le Niger peut être un hub du trafic international ?
Avec une superficie de 1 267 000 km2, le Niger est un vaste pays continental situé au cœur du continent africain, entre l’Afrique du nord, l’Afrique de l’ouest et l’Afrique centrale. A ce titre, la position géographique de notre pays lui confère un avantage en matière d’aviation civile, notamment pour servir de plateforme de correspondance aéroportuaire ou hub. De plus, le climat sec constitue un atout pour la mise en place d’un atelier de maintenance aéronautique.
Quelles sont les perspectives pour l’ANAC ainsi que vos ambitions et comment comptez-vous y parvenir ?
En termes de perspectives pour l’ANAC-Niger, les principaux chantiers que nous avons sont la révision du code de l’aviation civile, la création d’une compagnie aérienne nationale viable, l’élaboration de la stratégie de développement du transport aérien et enfin le renforcement des mesures de sécurité et de sûreté de l’aviation civile.
Mon ambition est de faire de l’ANAC-Niger une structure de référence, moderne et dotée de ressources humaines optimisées pour lui permettre d’assurer pleinement ses missions, notamment en matière de supervision de la sécurité et de la sûreté de l’aviation civile. J’ambitionne également que le transport aérien devienne accessible à tous pour le développement du transport aérien au Niger.
Réalisé par Zabeirou Moussa (ONEP)