En ce mois de ramadan, les fidèles sont très friands des boissons sucrées en particulier au moment de la rupture du jeûne. Outre les boissons gazeuses et autres jus naturels à base de produits locaux comme le bissap, le tamarin, le citron, le gingembre, le pain de singe, des solutions chimiques en poudre communément appelé ‘’tri-tup’’ inondent les marchés de la capitale. Du fait de leurs prix très accessibles, ces boissons sont fortement consommées par les populations qui ne se préoccupent pas des éventuels effets négatifs qu’elles pourraient avoir ces boissons.
Tiara, Pop drink, Foster clark’s, Davita, Joli jus, Bonjour, Gold, etc. sont autant de marques et de variétés de ces solutions en poudre qui inondent les différents marchés. Les sachets sont vendus de 50F CFA à 200 F CFA et l’emballage contenant 12 sachets est vendu entre 1000F CFA et 2000F CFA, selon la marque. Elles sont fortement consommées sous diverses formes dans plusieurs familles lors de la rupture du jeûne. Ainsi, les jus de fruits en poudre sont utilisés dans plusieurs préparations. Certains les dissolvent directement dans l’eau sans rien y ajouter ; d’autres les ajoutent dans les jus naturels ou ‘’lémouhari’’; d’autres encore les ajoutent dans du ‘’lamdourou’’ soit pour remonter le goût ou pour colorer la boisson.
«Ces boissons peuvent être dangereuses, mais elles sont très agréables dans la bouche et ont un prix abordable. Nous ne pouvons pas nous en passer, nous ne pouvons pas nous permettre d’acheter des jus raffinés qui coûtent chers, surtout qu’on a besoin de plus de rafraichissement pendant ce mois. C’est pourquoi on se tourne vers les boissons non naturelles, même si les gens les qualifient de jus qui, souvent, donnent des nausées ou des arrières goûts», reconnaît Mahamadou, un cireur de chaussure.
En dehors des consommateurs, les vendeurs du jus ‘’lémouhari’’ utilisent également ces produits comme additifs. Ce qui constitue pour eux, une manière d’économiser du sucre. «Les boissons en poudre contiennent beaucoup de sucre. On les utilise pour rehausser le goût, concentrer le jus, et ça permet également de lui donner une belle couleur, notamment dans le jus de bissap, de tamarin et de citron-gingembre», reconnait Mme Balkissa vendeuse de lemouhari. Pour cette dernière, l’utilisation des solutions en poudre est purement commerciale. «Si on dit qu’on va seulement se baser sur le sucre surtout avec la cherté des produits, on ne va pas s’en sortir. Il nous faut obligatoirement augmenter les jus en poudre pour pouvoir renforcer le jus. Par contre, si c’est seulement pour la consommation à la maison, on n’a pas besoin d’ajouter les produits en poudre. On peut utiliser uniquement le sucre», a-t-elle expliqué.
M. Yacouba, un consommateur, dit être au courant des éventuels problèmes ou dangers de ces boissons en poudre? Mais il dit les considérer comme étant de ‘’simples rumeurs’’. «Ca fait des années qu’on les consomme mais jusqu’là, nous n’avons rien vu comme désagrément. Notre situation, ne nous permet pas d’acheter des jus de luxe», se justifie-t-il.
«Moi, personnellement, je me sens à l’aise et en forme quand je prends ces boissons en poudre lors de la rupture. Ça me donne encore beaucoup plus de force, et d’énergie qui me permet même de travailler la nuit. Je suis vraiment habitué à les consommer. Parfois, c’est quand la personne met la chose dans sa tête que cela lui arrive», renchérit Bassirou, un tailleur ambulant.
Les spécialistes de la santé ont une autre version des choses relativement à ces produits. D’une manière générale explique le médecin généraliste,Dr Siradji A. Abidine, la consommation de ces substances n’est pas anodine sur la santé surtout lorsque celles-ci sont prises à répétition et non conformément aux prescriptions du fabriquant. Ces solutions sont en réalité des substances chimiques qui imitent les gouts et saveurs d’aliments naturels. Elles contiennent des conservateurs et exhausteurs de goût et des édulcorants.
Selon Dr. Siradji, les conséquences liées à l’utilisation de ces produits sont multiples, notamment le cancer, le diabète, l’infertilité, l’insuffisance rénale et les troubles endocriniens.«Dans les pays développés, l’utilisation de ces produits est bien réglementée, réduisant ainsi les risques sanitaires. Ce qui n’est pas le cas dans nos pays», explique le médecin généraliste.
D’après lui, l’avènement des nouvelles maladies est en grande partie lié à ce que les gens consomment. «Nous sommes torpillés à longueur de journée par des publicités qui font l’éloge des produits dont entre autre les jus, les tomates concentrées, les bouillons de cuisine le lait concentré. Ces produits ne peuvent exister sans les composés chimiques analogues à ceux retrouvés dans les jus en poudre», a fait savoir Dr Siradji.
Farida Ibrahim Assoumane(onep)