Le niébé (ou Vigna unguiculata) est une spéculation à forte valeur économique, cultivée le plus souvent sous pluie. Pourtant, sa production en décrue peut contribuer à augmenter davantage les rendements et conséquemment les revenus des producteurs. Cependant, même si le potentiel de culture en décrue existe dans les différentes régions du pays, les producteurs ne maîtrisent pas suffisamment les techniques de culture.
C’est pour répondre à cette problématique que le SP/CNRA a édité et élaboré un ‘’Recueil des fiches techniques sur les technologies et innovations générées par la recherche agronomique’’, publié par le CNRA en octobre 2023.
Ces fiches techniques comportent un certain nombre d’éléments essentiels à connaitre comme le choix des variétés, la période de semis, l’entretien des cultures, la fertilisation, les ennemis de cultures et le contrôle, les méthodes de récolte et de conservation de la production.
Choix de variétés
La culture du niébé en décrue se pratique dans les régions de Diffa, Dosso, Maradi, Tillabéri et Zinder. Elle se pratique généralement aux abords des mares ou dans les bas-fonds et les bras du fleuve et autres plans d’eau artificiels de surface, sans recours à l’irrigation. C’est pourquoi, il est recommandé l’utilisation de variétés précoces dont le cycle du semis à la récolte ne dépasse pas 80-90 jours. Dans la région de Diffa (lit du lac Tchad), les variétés recommandées sont, selon les chercheurs, les variétés locales rouges Dan Bederi, Gabokiné, Kilékandawo qui ont un cycle 90 à 100 jours et TN5-78. A Dosso (lit des Dallols), ce sont le TN5-78 et la locale (rouge) qui sont adaptés. A Maradi également, la locale et le TN5-78 sont recommandés et enfin à Tillabéri (lit du Goroual, vallées des marres et du fleuve), les spécialistes recommandent les variétés rouges : locale (Dan Loma) et le TN5-78 avec un cycle 70-80 jours.
Préparation du site de production et semis
La préparation du site peut commencer avant même la période de crue par le défrichement des arbustes (cas du lit du lac Tchad dans la région de Diffa). Les producteurs peuvent également poursuivre la préparation du site au fur et à mesure du retrait des eaux en vue d’améliorer le lit de semences. A ce titre, un désherbage, un labour manuel avec la daba, et un émottage permettent une aération du sol et la création d’un bon lit de semences.
Avant d’effectuer les semis, il est aussi conseillé de traiter les semences avec des fongibles recommandés. Les dates de semis sont variables car elles sont fonction du retrait de l’eau. Ainsi pour la région de Diffa, 3 périodes possibles pour les semis. Les 1ers semis peuvent être effectués entre le 15 janvier et le 15 février ; les 2è entre le 30 mai et le 15 juin et enfin, les 3è entre juillet et août. Pour la région de Dosso, la période recommandée est celle entre novembre et janvier ; pour la région de Maradi entre mi-septembre et fin octobre ; pour Tahoua, c’est la période de novembre-décembre-janvier et enfin pour Tillabéri, c’est entre septembre et octobre.
Le semis se fait en lignes avec des espacements variables suivant le système de culture adopté (association ou culture pure). Le semis se fait dans des trous de 20 à 40 cm de profondeur afin de placer les semences dans des conditions d’humidité de sol favorable. Il est préférable de placer 3 à 5 graines par poquet et de procéder à un démariage à 2 plants par poquet.
En culture pure, la densité de semis recommandée est de 0.80 m x 0.5 m pour les variétés à port érigé et semi- érigé. Dans le cas de culture associée, avec par exemple la tomate ou le maïs, la densité recommandée est 1.5 m x 1.5 m. Mais ces densités peuvent être réduites à 2.0 m x 1.5 m pour des sols moins riches.
La quantité de semences sera de 10 kg/ha pour la forte densité et de 7 à 8 kg/ha pour les faibles densités. Le traitement des semences avec un fongicide -insecticide permet une bonne germination et levée des plants.
Entretien de la culture, fertilisation, ennemis de cultures et contrôle
Pour éviter la concurrence des mauvaises herbes, les spécialistes recommandent 2 à 3 sarclo-binages suivant les conditions du milieu qui permettront le désherbage mais aussi l’aération du sol. C’est aussi pendant ce moment que l’on procède au remplacement des manquants, au démariage à 2 plants par poquet et au buttage quand les plants ont atteint environ 50 cm de haut.
Aussi, pour augmenter la productivité, il est recommandé de fertiliser le sol. Ainsi, il est conseillé de placer 5 g de 15-15-15 dans un trou de 20-25 cm de profondeur fait à 25- 30 cm de l’emplacement du trou de semis. On referme le trou au talon. Cette opération doit avoir lieu avant le semis pour ne pas risquer de boucher le trou de semis lorsqu’on le réalise. Une boite d’allumettes pleine fait environ 10 g d’engrais.
Les spécialistes relèvent que le niébé fait face à des attaques à tous les stades : décroissance/développement avec les pucerons comme étant le principal au stade végétatif ; les thrips au moment de floraison et les punaises. Pour éviter les maladies, il est recommandé au minimum trois traitements phytosanitaires dont le 1er contre les pucerons ; le 2e contre les thrips et le 3e contre les punaises. De même, on peut recourir à des traitements alternatifs avec des pesticides botaniques (à base des extraits de neem, du tabac ou du piment). Le Cyper-Diforce (nom commercial) est l’insecticide recommandé par les spécialistes. Le dosage est de 1 litre/ha par traitement, un minimum de deux traitements.
Méthode de récolte et conservation de la production
La récolte se fait lorsque les gousses sont mûres et sèches. Plusieurs récoltes (3 à 4) seront nécessaires car, les gousses n’arrivent pas à maturité en même temps du fait que la floraison est échelonnée dans le temps.
La conservation du niébé est une opération délicate pouvant causer des pertes importantes. Les bruches (Callosobruchus chinensis) sont de loin les plus importants insectes lors du stockage du niébé. Ainsi, la méthode de conservation recommandée consiste à l’utilisation des sacs triple ensachage ou sacs PICS.
Par ailleurs, l’utilisation des comprimés d’Alumine phosphide commercialisé sous divers noms (Phostoxin, Cyclotoxin, Force- toxin, Gastoxin, Protex, etc.) est déconseillée. Dans le cas de force majeure, il recommandé de ne pas mettre les comprimés directement avec les graines, mais de les placer dans un emballage (par exemple un tissu) laissant diffuser le produit.
Oumarou Moussa (ONEP)
Source : Récueil CNRA, octobre 2023