En léthargie depuis quelques années, le festival en l’honneur des communautés nomades peuhles wodaabés, le Guerowol reprend de plus bel en cette fin de saison des pluies. Il a eu lieu du 30 octobre au 1er novembre dernier à Foudouk-Natou, dans le département d’Ingall, à 7 km de Mararaba. Expression d’une diversité culturelle, le Guerowol est une belle occasion de se retrouver pour célébrer la cohésion sociale et l’esprit de solidarité. Il est aussi et surtout un bon moment d’intenses activités, où les jeunes hommes déploient leurs talents de séduction d’où le nom Guerowol. Les festivités sont placés se sont déroulés sous la présidence du Ministre en charge de la culture M. Hamid Mohamed en présence de plusieurs partenaires au développement.
Le thème de cette édition 2021, soutenue par le Président de la République, était « l’inclusion sociale et le développement durable des terroirs pour la paix et l’unité nationale ». Une cérémonie traditionnelle des communautés peuhles wodaabés, c’est une fête célébrée pour le culte de la beauté, de l’élégance et de la danse. Le festival Guerowol de Foudouk dans le septentrion nigérien est un cadre fédérateur. Au-delà du symbole culturel, cette édition a eu pour ambition d’être un véritable outil de développement de cette zone, afin que ceux qui détiennent « le savoir-faire en vivent ». Cet aspect de la culture nigérienne doit devenir un attrait touristique et ce rendez-vous a permis de recenser le patrimoine culturel de la zone et de faire du guerowol une cérémonie qui unit au-delà des frontières. Elle réunit lors des éditions des peuples nomades éleveurs et marchands membres de la communauté, venus de toutes les régions du pays et du Burkina Faso, à l’instar de l’Emir du Liptako qui y a assisté pour la première fois. Lors de certaines éditions ils viennent même du Nigeria, du Tchad, du Cameroun ou de la Centrafrique.
Pour Banwo Marafa, natif du terroir, membre de la communauté « ce festival guerowol est un lieu choisi par les chefferies traditionnelles, les lignages, les clans familiaux à la fin de la saison pluvieuse quand les pâturages sont abondants. C’est un worso où la séduction, la beauté, l’amour est très important. L’objectif c’est de faire connaître la culture, la sauvegarder, échanger avec les femmes et les hommes pour connaître leurs difficultés, leurs besoins. Ils ont aussi des séances de sensibilisation sur l’insécurité que rencontrent les populations nomades et surtout le fait de ne pas se laisser endoctriner ou être utilisés par les malfaiteurs pour accomplir de sales besognes. Aussi et surtout trouver du travail pour les jeunes femmes et hommes qui ont des aptitudes professionnelles et qui ont acquis des diplômes ».
Worso guerouol ou la séduction par la beauté
Durant deux (2) jours, du matin jusqu’au soir, des dizaines d’hommes s’alignent en face d’un autre groupe de jeunes filles, ces hommes chantent et dansent tout en brandissant leurs parures, leurs maquillages. A l’issue de cette fête guerowol, ces filles choisissent leurs petits amis, pourquoi pas leurs futurs maris. Ici la beauté est mise en exergue, les hommes aux beaux visages avec des traits fins, des lèvres maquillées se mettent à chanter en chœur. Ils passent du khôl pour avoir des beaux yeux tout autour et tracent les sourcils au charbon et se font dessiner un grand trait de couleur jaune argilée sur l’arête du nez. Ces hommes qui sont à l’honneur ont des yeux qui brillent, un large sourire pour faire apparaitre la denture blanche. Et pour la circonstance, ils se parent des beaux habits, un accoutrement multicolore et des couleurs vives. Tout autour des pieds et des bras scintillent des colliers, des perles, des coquillages. Toujours pour avoir une certaine coquetterie, ces hommes à l’honneur accrochent des plumes presque partout au niveau de la tête soutenus par des grands turbans enroulés tout autour. Ils font des pas cadencés, avec des grimaces au niveau des lèvres, des yeux et des gestes avec leurs bras. Tout en écarquillant les yeux, bornoyant de gauche à droite. Les femmes aussi sont de la partie, avec des coiffes apparentes, genre chignon. Leurs bras et les pieds recouverts de bracelets et de perles. Elles sont là pour admirer le spectacle qu’offrent ces jeunes hommes. Une occasion d’admirer les talents artistiques et esthétiques de leurs potentiels hommes.
« Cette fête a apporté beaucoup pour notre communauté, c’est un moment de retrouvailles, d’echanges entre les communautés, beaucoup ont su que la communauté a des atouts et des potentialités, il suffit juste de les exploiter pour que cela profite à tous. Nous avions étalé nos problèmes aux autorités administratives et coutumières qui étaient bien présentes. Nous avions fait la promotion de nos us et traditions. Nos discussions autour de ce cadre ont fait ressortir le rôle combien important de la culture, et aussi de faire la différence entre les wodaabés et les autres peulhs toucouleurs semi nomades et nomades. Et c’est pour la première fois que le village a échangé avec ces dites autorités. Et, nous pouvons dire que le festival a répondu favorablement à nos attentes. Nos sincères remerciements aux autorités de ce pays, surtout au Président de la République qui ont bien soutenu le festival » a expliqué Banwo Marafa
Retour aux sources
« Motivé par l’évolution de la crise sécuritaire, qui a mis à mal le secteur touristique dont vivaient en partie certaines régions, le festival Guerowol visait la création d’un
« cadre d’expression culturelle, l’initiative, soutenue au plus haut niveau. C’est un « festival communautaire » parce qu’il réunit ceux qui aiment la culture pour magnifier les cultures du Niger », se défend M. Doula Makao, Président du comité d’organisation. Initié par « un fils du terroir à la conquête de sa culture, qu’ils entendent valoriser et promouvoir», Pour cette édition, à la fin du mois d’octobre, le festival n’en est pas moins ambitieux. Il est célébré en général pour les bons pâturages. Les initiateurs, à travers ce rassemblement, prônent le retour à nos valeurs sociétales, l’intégrité, le respect du bien public notamment, qui sont des valeurs qu’incarne encore cette communauté, d’où ce choix de Foudouk », explique M. Doula Makao. Cadre de sauvegarde de nos valeurs cardinales, ce festival est un complément avec toutes les autres manifestations des communautés nomades comme la Cure Salée, le Hotungo… « Il faut innover, créer des initiatives pour que ces festivals purement communautaires soient viables, en créant des emplois aux jeunes » insiste le Président du comité. Les organisateurs souhaitent que ceux qui ont des « initiatives communautaires s’associent pour magnifier la culture nomade. C’est pourquoi, chaque édition, le festival apporte des innovations.
Madame Zada Annatou Seydou, Conseillère du Président de la République a declaré que le Niger est un pays très vaste, composé d’une riche variété de communautés, avec chacune sa culture, ses traditions, ses us et coutumes, si intéressant à découvrir. « Nous sommes donc allés à la rencontre de nos frères et sœurs de Foudouk pour partager avec eux les joies de la fête annuelle du Guerewol, une fête de convivialité, de fraternité, de rapprochement, de cohésion et d’échanges. Elle a été grandiose et riche en événements. Les populations de Foudouk très heureuses de nous voir venir leur rendre visite et passer ces quelques jours de festivités avec eux, ont aujourd’hui la certitude, l’assurance, qu’ils ne sont pas laissés pour compte et que le Président de la République, SE Mohamed Bazoum, soucieux du bien-être de sa population en lui assurant une bonne Education, une autosuffisance alimentaire, une sécurité, un accès à l’eau potable et aux soins de santé, ne les oublie pas. Le déplacement à Foudouk des autorités et des Partenaires techniques et financiers en est une parfaite illustration des soucis du Président et de son intention de faire du Niger un havre de paix, un pays leader, un pays émergent avec une population épanouie et unie »
Docteur Bodé Sambo, Conseiller à la Haute Autorité à la Consolidation de la Paix d’affirmer que les Wodaabe sont un peuple nomade mobile au cours de toute l’année pour valoriser des ressources pastorales complémentaires. Chaque lignage constitue un village mobile. Les membres d’un même lignage ne se rassemblent qu’au cours du Worso pendant une semaine. Au-delà du rassemblement c’est un moment de communion, de l’unité entre les familles du lignage mais aussi avec d’autres lignages pour renforcer la cohésion sociale. Pendant le Worso les jeunes chantent et dansent au rythme du Guerewol, tandis que les sages règlent les différends entre familles et entre lignages, en raffermissant les liens sociaux. Ce type de rassemblement culturel spécifique au groupe Peul Wodaabe est une belle occasion à promouvoir au Niger dans le cadre de la consolidation de la paix entre les communautés.C’est en effet l’occasion saisi lors du Worso de Foudouk des Wodaabe Bigawa d’Agadez, une tradition à soutenir dans le cadre de la promotion de nos valeurs culturelles. »
Des activités connexes comme la course des chameaux, les défilés des troupes, renouer les liens d’amitié et de fraternité entre les communautés. Des activités parallèles qui mobilisent bon nombre de participants et qui suscitent un réel engouement. Des jeunes gens s’entrainent des semaines durant pour gagner des prix et faire la fierté de toute une communauté. Des messages sur la paix, des débats sur la coexistence pacifique ont marqué aussi ce festival.
Guerowol c’est aussi des espaces aménagés pour l’exposition vente des objets de valeurs du terroir, de plus belles créations sur le marché, des expositions des nattes, des perles et bracelets confectionnés à la main, des lits aux magnifiques décorations, des tissus culturels brodés, des poteries décorées. Ces femmes exposent leurs créations qu’elles ont mis des mois à confectionner pour espérer les vendre au grand bonheur de leurs familles. Il y’a eu des visites au niveau des sites patrimoniaux, ce patrimoine présenté dans toute sa splendeur aux festivaliers qui ont fait le déplacement en masse. Des nombreuses opportunités sont ainsi offertes pour faire connaitre Foudouk dans sa diversité culturelle, économique et sociale.
Par Aïssa Abdoulaye Alfary(onep)