Il y a de plus en plus au Niger et surtout à Niamey, des forages privés et des unités de production d’eau de table en sachet ou « pure water » en anglais. Au regard de l’ampleur de ces deux activités la question de la qualité des installations et de l’eau exploitée, du respect des normes en la matière se pose.
En ce qui concerne l’approvisionnement en eau des populations et du cheptel, M. Yacouba Maidaoua, de la Direction Générale de l’Hydraulique, au Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement souligne que dans les dispositions du code de l’eau, à son article 72, il est indiqué : « L’eau livrée à la consommation des populations doit être potable. Les normes nationales de qualité de l’eau (potabilité) destinée à la consommation humaine sont fixées par voie réglementaire. Les ministres en charge de l’eau et de la santé publique déterminent les conditions du contrôle de la qualité de l’eau distribuée et veillent au respect des normes nationales de qualité de l’eau destinée à la consommation humaine ».
D’autre part, il est important de reconnaitre que, l’Etat, à lui seul, ne peut satisfaire à cette obligation : « offrir de l’eau à tous ». C’est pourquoi, dans le code, le législateur a accordé la possibilité à des tierces personnes physiques ou morales de bénéficier d’une possibilité d’exploitation de l’eau. Cette possibilité est encadrée à l’article 47 du code de l’eau qui stipule que :
« Des concessions d’utilisation de l’eau et d’exploitation d’ouvrages et d’installations hydrauliques peuvent être accordées aux personnes morales de droit privé lorsque leur installation présente un caractère d’intérêt général ».
Mais, M. Yacouba Maidaoua soutient que, cette exploitation doit respecter les conditions édictées par le même code de l’eau aux articles 43 et 44. « Les aménagements, les ouvrages, les installations et les activités sont soumis aux régimes suivants : le régime de la déclaration ; le régime de l’autorisation ; le régime de la concession d’utilisation de l’eau », article 43. L’article 44 dit : « Sont soumis à autorisation, déclaration ou concession d’utilisation de l’eau, les aménagements hydrauliques, et d’une manière générale, les installations, les ouvrages, les travaux et les activités réalisés par toute personne physique ou morale, publique ou privée, et entraînant, selon le cas : des prélèvements d’eau superficielle ou souterraine, restitués ou non ; des modifications du niveau ou du mode d’écoulement des eaux ; des déversements, des écoulements, des rejets ou des dépôts directs ou indirects, permanents ou périodiques, polluants ou non ». Le même article ajoute que « les installations, les ouvrages, les travaux et les activités visés ci-dessus sont soumis à autorisation ou à déclaration suivant leur nature, leur localisation, leur importance ou la gravité de leurs effets sur la ressource en eau et les systèmes aquatiques ». Donc on ne peut pas empêcher à ces tiers de venir demander une autorisation et d’aller, mettre leurs moyens pour faire un ouvrage et l’exploiter. Il faut néanmoins donner toutes les précisions.
Ainsi, selon les termes des différentes dispositions de cette ordonnance portant code de l’eau en République du Niger, tout Nigérien peut exploiter la nappe souterraine, mais à condition de déposer une demande à l’arrondissement communal à l’intention de la collectivité territoriale pour demander le fonçage d’un forage ou d’un puits. Dans cette demande, explique M. Yacouba, le motif de l’usage de cette eau et l’évaluation du devis sur l’allure d’exploitation doivent être précisés. « Lors du dépôt, le dossier se fait examiner par le directeur départemental qui peut donner son avis favorable et ses consignes et donner l’autorisation de réaliser le forage. Seulement, avant la consommation il faut s’assurer que l’eau est de bonne qualité en faisant une analyse par un test psycho chimique ou bactériologique », explique-t-il. Par le passé, les vérifications sont faites selon les normes de l’OMS, mais aujourd’hui, le ministère de la santé publique possède ses propres normes de potabilité d’eau (Arrêté nº 141/MSP/LCE/DGSP/DS fixant les normes de potabilité des eaux de boisson). En résumé, les dispositions du présent arrêté fixent les normes de potabilité de l’eau destinée à la boisson, et déterminent les valeurs limite du point de vue des caractéristiques physiques, chimiques et microbiologiques de l’eau ainsi que des valeurs indicatives du point de vue de la qualité de la ressource.
A cet effet, il est clair, que la réalisation de tout point d’eau moderne et l’exploitation de cette eau doit répondre aux normes. D’ailleurs, tous les ouvrages modernes construits par l’Etat et/ou par les partenaires sont soumis à ces conditions de contrôle qualité. Mais le risque est certainement au niveau de certains domaines privés qui échappent aux contrôles. A cela, s’ajoute aujourd’hui, les unités de production de l’eau en sachet dont certaines ne respectent pas les mesures d’hygiène, ce qui constitue un risque pour la santé humaine.
Les unités de production de pure-water sont-elles soumises à un contrôle ?
Parlant ainsi, de l’implantation des unités de production en sachet, M. Yacouba a souligné que cette ressource fournie aux populations devenue un produit de grande consommation au Niger suscite beaucoup d’inquiétudes.
« En effet, les conditions et l’état de ces unités et de l’eau, depuis la production jusqu’à la commercialisation ne garantissent pas toujours la qualité d’une eau potable », estime-t-il. La principale cause est certainement liée à la construction à titre privé et sans respect des normes des forages privés et l’exploitation des eaux sans analyse préalable. Il y’a aussi, les conditions d’emballage de cette eau et celles de la commercialisation. Dans la plupart des cas dans ces unités les mesures d’hygiène ne sont pas respectées, mais aussi à la vente, les jeunes ne sont pas dans les conditions d’hygiène appropriées. A ce niveau, la nécessité de veiller au respect des mesures d’hygiène s’impose dans toutes les unités de telles activités.
Pour ceux qui relient leur machine au réseau d’alimentation en eau, il n’y a pas trop de risque par rapport à l’eau. Mais c’est au niveau souvent de l’emballage que l’eau s’expose à la contamination. « Au niveau de la production on injecte du chlore qui est une substance chimique qui a pour but de maintenir la qualité de l’eau et qui élimine les bactéries. Et durant tout le traitement à chaque niveau des spécialistes font une vérification du dosage injecté dans le traitement qui n’est pas dangereux pour la santé et qui permet de maintenir l’eau en bonne qualité. Mais, si on prend l’eau déjà traitée pour mettre dans des réservoirs, il y’a manipulation. Donc il peut y avoir une contamination. Autrement dit, lors de la transformation quand une personne tousse, ou quand des goûtes de sueurs tombent dans cette eau lors du transport, les résidus peuvent être contenus et cela peut entrainer la contamination de l’eau », a expliqué M. Yacouba Maidaoua.
D’autres part, a-t-il ajouté, il y’a ceux qui construisent des forages dans leur concession. « Pour la santé de la population ce n’est pas bon de réaliser un forage de faible profondeur et de consommer l’eau de ce forage. Il existe des normes de profondeur à respecter pour la construction d’un puits, d’un forage », précise-t-il.
Dans certain cas, il y’a des gens qui transforment des anciens puits en fausse septique. Donc il peut y’avoir une contamination directe avec la source de l’eau, même s’ils n’ont pas la même profondeur car dans le sous-sol l’eau n’est pas stable, elle se déplace. « Pour que l’eau soit propre et dépourvue de saletés il faut qu’elle traverse plusieurs couches. Donc il peut arriver slors de la création d’un forage que cette eau des fractures soit captée par l’eau de la fausse septique et le mélange des deux eaux donnent une contamination directe. C’est pourquoi il n’est pas conseillé de faire des forages à faible profondeur dans les agglomérations », affirme M. Yacouba Maidaoua.
Alors, face à cette situation de construction des forages privés et mise en place des unités de production d’eau appelée Pure water, il y’a nécessité pour les autorités compétentes, à savoir le Ministère en charge de la Santé Publique, celui de l’Hydraulique et de l’Assainissement de réactiver les services de contrôle. L’obligation faite par la loi, d’assurer la santé de la population exige de mettre de l’ordre dans cette affaire. Il faut faire en sorte que les conditions pour la réalisation des ouvrages soient respectées afin d’éviter le risque de consommation d’une eau non potable.
Par Aminatou Seydou Harouna et Ali Maman(onep)