Que représente l’accession du Niger au Conseil de Sécurité des Nations Unies ?
La participation du Niger aux activités du Conseil de Sécurité en qualité de membre non-permanent fait de lui un membre de l’organe exécutif de l’Organisation des Nations Unies. Ainsi, il partage avec les autres membres du Conseil la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationale. C’est dire tout le symbole que revêt, pour le Niger, la qualité de membre du Conseil de Sécurité. Cela le distingue sur la scène diplomatique africaine et mondiale et, en même temps, l’investit de lourdes et exaltantes responsabilités.
Il convient de rappeler que depuis son accession à la souveraineté internationale, c’est la deuxième fois que le Niger siège au sein de cette auguste institution après son premier mandat qui remonte en 1980 et 1981. Siéger au Conseil de sécurité est un privilège exceptionnel qu’un tiers des 193 pays membres des Nations Unies (soit 62 pays) n’ont pas encore eu la chance de connaître. C’est aussi une question de responsabilité car cela implique des engagements importants pour les pays concernés, qui se doivent de déployer les moyens nécessaires, matériels et humains, pour répondre aux fortes attentes de la communauté internationale. Ce qui n’est pas négligeable au regard de la préparation et de l’engagement que requièrent les responsabilités de membre du Conseil de Sécurité,
Il convient également de signaler que le retour du Niger au sein du Conseil de sécurité est le résultat d’une activité diplomatique concluante engagée depuis 2011. Celle-ci a largement influencé les grandes décisions, sur les sujets d’intérêt commun, aux niveaux sous régional, régional et international, où les engagements et les contributions avisées des dirigeants nigériens sur les questions d’importance stratégique sont reconnues et appréciées. Plusieurs autres faits ont pu renforcer la confiance dont jouit notre pays sur la scène internationale.
Nous pouvons ainsi citer le comportement exemplaire, depuis plusieurs décennies des militaires nigériens au sein des contingents du maintien de la paix des Nations Unies ou encore la contribution décisive du Président de la République dans le processus d’intégration du continent
notamment à travers l’aboutissement, en un temps record, du projet panafricain de la Zone de libre échange continentale africaine (ZLECAf).
C’est donc une des promesses du Président de la République qui est ainsi honorée à travers l’accession de notre pays au Conseil de Sécurité. Il s’agit incontestablement du couronnement des efforts diplomatiques déployés par le Niger depuis bientôt dix ans.
Le Niger siège au Conseil de Sécurité des Nations Unies depuis le 1er janvier 2020. Quelle appréciation faites-vous de ce début du mandat ?
Être membre du Conseil nécessite, comme je le disais tantôt, une bonne préparation et un grand sens de responsabilité parce que le Niger est désormais, pour deux ans, parmi les Etats qui négocient et discutent sur les grands sujets de préoccupation mondiale, comme le terrorisme, le climat, la migration, le nucléaire, le multilatéralisme, etc.., autant de questions qui conditionnent la paix et la sécurité au niveau mondial. Donc, plus qu’un privilège, il s’agit pour le Niger d’un redoutable défi, car, le Niger doit mériter la confiance qui a été placée en lui par la CEDEAO et l’Union Africaine.
Et pour ce faire, nous avons pris des dispositions pour être à la hauteur de cette mission, aussi bien au niveau de notre Représentation Permanente à New York qu’au niveau Central à Niamey, où une Cellule Centrale d’appui à la Mission Permanente du Niger au Conseil de sécurité a été mise en place depuis le mois de janvier 2020. Ainsi, outre la Mission Permanente, la cellule de New York et celle de Niamey, nous avons mobilisé plus d’une trentaine (30) d’Experts à cet effet.
Il convient de noter que depuis son accession au Conseil de sécurité, le Niger porte une position de leadership qui le met en avant dans la coordination des négociations et des réflexions sur les questions de paix et de sécurité internationale. Une des manifestations de ce leadership, réside dans l’animation et la coordination du groupe des trois pays membres africains du Conseil (l’Afrique du Sud, le Niger et la Tunisie) et Saint-Vincent et les Grenadines, qui constituent une sorte de groupe de pression pour défendre leurs intérêts communs au sein du Conseil. C’est ce qu’on appelle dans le jargon onusien les A3+1, signifiant le Groupe des trois (3) pays africains et Saint-Vincent et les Grenadines, qui est un pays des Caraïbes. Cela permet de renforcer davantage nos positions régionales ou nationales au sein du Conseil de sécurité, en générant plus de soutien autour de celles-ci.
D’ailleurs le Niger est le porte-plume du Conseil de Sécurité en ce qui concerne la situation en Guinée-Bissau où, comme vous le savez, il a un avantage comparatif en sa qualité de Président en Exercice de la Commission Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
D’une manière générale, le Niger, seul ou avec les pays qui lui sont associés, est partie prenante à d’intenses consultations non seulement avec les cinq membres permanents du Conseil, mais aussi avec des pays ou des groupes de pays, des organisations internationales et de beaucoup d’autres acteurs du processus multilatéral mondial. C’est cette posture d’acteur de premier plan, dans le contexte multilatéral mondial, qui est celle du Niger aujourd’hui. Je dois dire qu’elle honore tout le peuple nigérien.
Quelles sont les ambitions du Niger au Conseil de Sécurité?
Les ambitions du Niger vis-à-vis du Conseil de Sécurité des Nations Unies sont de divers ordres. La première est celle de sa visibilité internationale et de sa volonté de prendre part à la résolution des grandes questions internationales de paix et de sécurité. Son ambition est de promouvoir la culture de la paix, mission principale du Conseil de sécurité, conformément aux buts et aux principes de la Charte des Nations Unies. Le thème de l’UA pour l’année 2020 à savoir : « Faire taire les armes sur le continent» constitue une préoccupation constante pour notre équipe. Par ailleurs, le Niger s’impliquera ardemment dans le traitement des grandes questions internationales comme l’environnement, la sécurité et le développement de l’espace sahélo-saharien. Il militera également pour une gouvernance mondiale plus ouverte et plus démocratique avec la réforme du Conseil de sécurité, de la Banque mondiale et d’une manière générale du système qui a été mise en place après la deuxième guerre mondiale.
Pouvez-vous donner quelques exemples d’actions significatives du Niger au Conseil de sécurité depuis sa brillante élection à cette prestigieuse institution?
Les responsabilités du Niger au Conseil de Sécurité sont grandes. Actuellement, le Niger préside certains comités spécifiques. Certains se rapportent aux missions du Conseil de Sécurité (exemple du Comité sur les sanctions en République Centrafricaine) ou à la situation dans certains pays (exemple du Groupe de travail sur la RDC) ou le comité contre le terrorisme. Dans chacun de ces comités, notre pays joue pleinement son rôle de portevoix de l’Afrique.
Permettez- moi de mettre l’accent sur la situation au Mali, une crise qui est à nos portes et qui nous touche directement. Le Niger a joué un rôle important dans le cadre de la recherche de solutions à la crise malienne. Il s’est fortement impliqué dans le renouvellement et le renforcement du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) au Conseil de Sécurité. Comme on le sait, le Conseil a adopté en juin dernier une résolution dans ce sens. Aujourd’hui, on peut légitimement se réjouir de ce que le mandat de la MINUSMA ait été prolongé jusqu’au 30 juin 2021, avec un effectif de 13.289 militaires et 1920 policiers.
Par ailleurs, le Niger s’active à obtenir un soutien important et pérenne à la Force conjointe du G5 Sahel dont le but est de lutter contre le terrorisme dans l’espace des cinq (5) pays qui composent l’organisation.
En outre, l’une des actions à laquelle notre pays a été d’un apport essentiel, c’est la situation en Guinée Bissau, un pays qui traverse lui aussi une crise politique majeure, et qui a fait l’objet en février dernier d’examen par le Conseil de Sécurité, notamment sur le mandat du Bureau Intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Guinée Bissau (BINUGBIS). Le Conseil de Sécurité a prolongé le mandat du BINUGBIS jusqu’au 31 décembre 2020. Un bureau dont la mission est de soutenir les accords de Conakry et la feuille de route de la CEDEAO, de faciliter un dialogue inclusif, le processus de réconciliation et de renforcer la gouvernance démocratique.
Il convient de signaler également le rôle important que le Niger a joué dans les efforts du Conseil de Sécurité pour la consolidation de la paix au Soudan du Sud, en Libye, en Syrie, au Jammu et Cachemire, entre autres.
Le Niger va présider le Conseil de Sécurité en septembre prochain. Qu’est ce qu’il compte faire pendant sa présidence ?
Avant de répondre à votre question, je rappelle que la présidence de Conseil de sécurité est assurée par chacun des quinze (15) membres à tour de rôle, pendant un mois. En septembre prochain, ce sera le tour de notre pays. Présider une enceinte comme le Conseil de sécurité où se traitent les grandes questions internationales en matière de paix et de sécurité est une charge redoutable. Cette présidence nous permettra donc de partager et de traduire notre vision et celle de tout le continent africain sur les questions de paix et de sécurité internationales. Notre pays va organiser à cet effet des réunions et des évènements sur des questions d’intérêt pour lui et pour notre continent. Il préparera ainsi de concert avec la Tunisie, l’Afrique du sud, les Saint-Vincent et Grenadines, de pertinentes résolutions en vue de leur adoption par le Conseil de sécurité au cours de sa présidence. Nous aurons le temps de revenir de façon plus approfondie sur ce sujet.
Actualité oblige, quelle est la position du Conseil de Sécurité sur la situation au Mali ?
Tout comme la CEDEAO, le Conseil de Sécurité a exprimé sa profonde inquiétude face aux dernières tensions politiques au Mali. Les membres du Conseil ont exprimé leur ferme soutien aux efforts de médiation de la CEDEAO, y compris les missions conduites par l’ancien Président du Nigeria, Good Luck Jonathan et celles des actuels Chefs d’Etat de la région dirigée par Son Excellence Issoufou Mahamadou, Président en exercice des Chefs d’Etat et de Gouvernement de la CEDEAO. Le Conseil de Sécurité a également pris note des recommandations issues du dernier Sommet Extraordinaire des Chefs d’Etats de la CEDEAO sur la crise malienne et s’est engagé à assurer son ferme soutien pour la mise en œuvre des décisions de ce sommet.
Sources : MAE/C/IA/NE