La polyarthrite est une maladie chronique articulaire et inflammatoire provoquant des rhumatismes inflammatoires. Elle est plus fréquente chez les femmes et prend de l’ampleur en Afrique en général, et au Niger en particulier. Bien que peu connue, cette maladie existe bel et bien et ébranle la tranquillité de beaucoup de familles.
La polyarthrite rhumatoïde (PR) se définit comme un rhumatisme inflammatoire chronique touchant les petites articulations des extrémités avec des déformations et des érosions articulaires invalidantes. Elle se classe parmi les maladies auto-immunes dites systémiques, c’est-à-dire que la réponse immunitaire est dirigée contre les anticorps des antigènes cibles présents dans de nombreux organes.
Selon l’organisation mondiale de la santé (OMS), 18 millions de personnes dans le monde étaient atteintes de la polyarthrite rhumatoïde en 2019. Environ 70 % sont des femmes et 55 % ont plus de 55 ans, dont 13 millions souffrent d’une forme suffisamment grave (modérée ou grave) pour qu’une réadaptation soit indiquée. C’est une maladie qui affecte plusieurs systèmes de l’organisme, mais les parties le plus souvent touchées sont les articulations, les mains, les poignets, les pieds, les chevilles, les genoux, les épaules, et les coudes.
Selon Docteur Alassane Hamadou Seydou, la polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie qui fait partie d’un grand groupe qu’on appelle rhumatisme inflammatoire dont l’étiologie (la cause primaire) n’est pas définie. Mais, il s’agit d’une infection multifactorielle qui nécessite le plus souvent un support génétique parce que ce n’est pas toute personne qui peut être atteinte de cette maladie. « On avait constaté dans le génome des gens qui sont affectés par la polyarthrite rhumatoïde qu’ils ont des gènes spécifiques qu’on appelle HALDR1 et HALDR4. Donc c’est une spécificité », a expliqué le médecin.
Les personnes les plus vulnérables
C’est une maladie à prédominance féminine qui survient chez la femme adulte dans la cinquantaine le plus souvent. « Mais dans nos contrées, ici au Niger, nous avons donc fait le constat que c’est une maladie qu’on rencontre chez les sujets jeunes, parfois même en âge très jeune. Dans ce contexte, la maladie change de nom, on parle plutôt d’arthrite juvénile Iyopatique, mais, avec le temps, on a la confirmation d’une polyarthrite rhumatoïde », a ajouté Dr Alassan Hamadou.
Parmi les victimes de la polyarthrite rhumatoïde figure Hanatou Halidou, une jeune fille qui, depuis des années, mène une lutte acharnée contre cette maladie avec le soutien de sa famille. « J’ai commencé à avoir des douleurs au niveau de mes articulations et mes mains ont commencé à s’enfler. En 2011, j’étais tombée gravement malade ; il était difficile pour moi de continuer les études dans cette situation. J’ai souffert jour et nuit. C’est en 2019 que mes parents avaient découvert que je souffre de la polyarthrite après avoir eu un choc au niveau de ma hanche », a-t-elle fait savoir. Mais cette situation n’a pas découragé Hanatou à persévérer dans ses études en continuant d’être toujours une élève studieuse. « Malgré sa maladie, elle a toujours la passion pour ses études. Elle disait l’ESSCOM ou la mort, c’est son slogan préféré », confie la maman de Hanatou d’un air peiné.
La Polyarthrite Rhumatoïde (PR) au Niger
C’est une maladie dont l’origine reste inconnue. Cependant, plusieurs facteurs interviennent dans son déclenchement, notamment environnementaux, un terrain génétique prédisposé et des facteurs hormonaux.
Dans les thèses des médecins Abdoul Kader Andia Seydou Alassane et Brah Souleymane, il a été rapporté que 42 cas de la polyarthrite rhumatoïde ont été détectés à l’Hôpital National de Niamey. Il a aussi été rapporté que la polyarthrite rhumatoïde (PR), maladie auto-immune, est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques. Elle se caractérise par une réponse inflammatoire exagérée de la synoviale avec un potentiel destructif ostéo-articulaire. Les premiers huit (8) cas ont été détectés il y a 5 ans. Ce travail rapporte les caractéristiques épidémiologiques, cliniques, para cliniques et thérapeutiques de la polyarthrite rhumatoïde au Niger. Il s’agit d’une étude rétrospective transversale de dossiers des patients hospitalisés dans les services de Rhumatologie et de Médecine interne de l’Hôpital National de Niamey (HNN) pour la PR du 1er janvier au 30 septembre 2014.
Le diagnostic se réfère aux critères révisés ACR 1987. Quarante-deux (42) dossiers de patients ont été colligés, l’âge moyen des patients était de 45,9 ans [18-85] avec une prédominance féminine (83 %). La durée moyenne des signes avant le diagnostic était de 51,6 mois. Les articulations de la main étaient les plus touchées (65,5 %), suivies des genoux (11,5 %). Les déformations articulaires souvent observées étaient : « coup de vent » cubital des doigts (14 %) ; doigts en « boutonnière » (9 %). Les PR séronégatifs représentaient 40 %. Les anticorps anti CCP étaient positifs chez 8 % des patients initialement FR négatifs. Les lésions à la radiographie de la main étaient à type d’érosion (13/15 cas) et de déminéralisations osseuses (2/15 cas). Le DAS28 moyen à l’admission n’était que de 2,6 [2.2 – 5,9] et 5 % avaient une forte activité de PR. Tous les patients ont été sous DMARDS et corticothérapie orale.
Traitement et accompagnement
L’objectif du traitement est d’atteindre et de maintenir la rémission clinique ou au minimum la faible activité. L’activité de la maladie doit être mesurée par des critères composites validés, incluant les indices articulaires, l’absence de signes et symptômes d’activité inflammatoire significative. Le suivi de la maladie par le rhumatologue doit être fréquent (1 à 3 mois) tant que la maladie est active. S’il n’y a pas d’amélioration dans les mois suivant le début du traitement ou si l’objectif thérapeutique n’a pas été atteint à 6 mois, le traitement doit être ajusté. Le méthotrexate est le traitement de fond de première ligne chez les patients ayant une PR active avec une posologie initiale optimale atteinte au maximum en 4 à 8 semaines. Chez les patients naïfs, le traitement de fond, en cas de contre-indication au méthotrexate ou d’intolérance précoce, le flunomide ou la sulfasalazine sont une alternative thérapeutique. Dans l’attente de l’efficacité d’un traitement de fond synthétique conventionnel, une corticothérapie orale ou injectable peut être proposée en respectant une dose cumulée faible, si possible sur une période maximale de 6 mois. La corticothérapie sera diminuée et arrêtée aussi rapidement que possible.
En outre, Dr Alassane explique que le traitement est très coûteux. Il requiert un sacrifice énorme de la part des familles.
La jeune Hanatou a précisé que les produits coûtent cher. Malgré les moyens limités de ses parents, ces derniers arrivent quand même à lui assurer son traitement. « Le docteur me prescrit des médicaments qui coûtent vraiment trop cher », a-t-elle dit.
Néanmoins, le spécialiste ajoute que cette maladie est considérée comme un handicap, donc les personnes atteintes doivent bénéficier d’un soutien familial et scolaire, au niveau du conjoint ou des maitres si c’est une personne qui est encore sur les bancs d’apprentissage. « C’est pour cela que, depuis un certain temps, l’ensemble des médecins qui s’occupent de ces types de maladie ont engagé un processus de réflexion qui est en cours pour aboutir à la création d’une association pour permettre à ces gens de se réunir en vue de faire un plaidoyer qu’on allait porter au niveau des autorités ou au niveau des institutions qui s’occupent de ces types de maladie. Ailleurs, il y a des sensibilisations qui se font et qui doivent permettre de dépister rapidement la maladie », a-t-il conclu.
Soumana Halidou (Stagiaire)
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Hanatou Halidou, une victime au parcours singulier
Plusieurs personnes dans ce monde souffrent de maladies chroniques qui impactent significativement leur qualité de vie. C’est le cas de Hanatou Halidou, diplômée en Journalisme Audio-Visuel et victime de la polyarthrite rhumatoïde. Elle a su franchir, avec ténacité, les obstacles liés à son parcours scolaire. En dépit des complications graves qu’elle a rencontrées, son amour pour les études n’a jamais faibli.
Passée par l’Ecole Supérieure des Sciences de la Communication et des Médias (ESSCOM), ex IFTIC, Hanatou est une fille de 24 ans qui a obtenu sa licence professionnelle en journalisme Audio-Visuel (JAV) le 15 juillet 2024. Elle est sortie majeure de sa promotion en décrochant son diplôme avec une moyenne de 16/20. Dès le bas âge, Hanatou fut victime de la maladie appelée polyarthrite rhumatoïde qui, au fur et à mesure, dégradait le processus de sa croissance. En 2019, après avoir eu un choc au niveau de la hanche, ses parents ont décelé qu’elle était atteinte de la polyarthrite rhumatoïde alors qu’elle souffrait depuis 2011 de cette maladie. Malgré cela, elle n’a eu de cesse de persévérer dans son parcours scolaire en décrochant des bonnes notes. « J’étais en classe de CM2 quand les douleurs ont commencé à devenir sévères. Je ne pouvais pas marcher. Pour aller à l’école, je sortais de la maison à 7h 30, mais il faut 1heure de temps de marche pour que je rejoigne la classe, pourtant l’école était tout près de chez moi. Le simple fait de marcher était un prix à payer, une grande épreuve », a-t-elle expliqué.
Malgré son handicap, elle est restée un modèle pour son entourage. Courtoise et gentille, elle est admirée par toutes les personnes qu’elle côtoie. C’est le cas de M. Zabeirou, vendeur de condiments dans le quartier de Hanatou, qui témoigne qu’elle avait grandi sous ses yeux et n’a jamais manqué de respect à personne. « C’est une fille gentille, qui n’est pas hautaine comme ses autres camarades du quartier. De même, elle souffre d’une maladie grave », dit-il.
La brave Hanatou avait eu la chance de rencontrer le docteur Alhassan Hamadou Seydou, médecin interniste Rhumatologue, qui a été plus qu’un simple médecin, mais un père pour elle. Le Docteur l’avait assistée dans ses moments les plus difficiles où elle avait tant besoin de secours d’urgence. Son médecin nous faisait comprendre que ça n’a pas été une tâche facile pour les parents de Hanatou de poursuivre le traitement dans la mesure où les médicaments étaient trop chers. « C’est un traitement qui est très cher et je sais que c’est un sacrifice énorme », a dit le docteur.
Ce faisant, Hanatou avait aussi le soutien indéfectible de ses parents qui sont constamment en première ligne dans ce combat pour une éventuelle guérison totale de leur fille. En effet, la maman de Hanatou explique comment ils n’avaient pas la conscience tranquille lorsqu’elle est absente de la maison. À tout moment, il se pourrait qu’on les appelle pour les informer qu’elle a encore piqué une crise. « Un jour, nous avons été informés qu’elle a piqué une crise à l’école et qu’elle était transportée à l’hôpital », se souvient la maman de Hannatou.
Pour la jeune fille, le handicap n’est pas une fatalité. Difficilement, elle a pu gravir les échelons académiques. Par sa persévérance et son amour du travail, elle a su laisser une trace indélébile à l’ESSCOM : celle de la meilleure étudiante. Son mémoire de fin de cycle a d’ailleurs porté sur le thème ‘’Rôle de la Télévision nationale dans la sensibilisation pour une meilleure connaissance de la polyarthrite Rhumatoïde dans la ville de Niamey’’. Elle précise que c’est le premier mémoire au Niger parlant de toutes les caractéristiques de la polyarthrite rhumatoïde, accompagné d’un film de 12 minutes et 25 secondes titré « Doro Kal Koyo », autrement dit « la souffrance silencieuse ». Un film apprécié par l’ensemble du jury pour la qualité des images et du son, et pour le témoignage poignant d’une « martyre », que retrace le film.
Soumana Halidou (Stagiaire)