
Des oeuvres artistiques tridimensionnelles en bronze ...
La sculpture est l’une des formes d’art les plus anciennes et les plus universelles, présente dans toutes les civilisations humaines. Elle désigne l’art de modeler, tailler ou sculpter des matériaux solides, tels que la pierre, le métal, le bois, ou encore l’argile pour créer des œuvres en trois dimensions. Elle a toujours été utilisée à la fois comme moyen d’expression artistique, support d’idéologies et outil de mémoire.
Le sculpteur joue un rôle important dans la réflexion esthétique et culturelle. Son travail peut être influencé par des courants artistiques, des contextes sociaux, mais aussi par des interrogations personnelles sur l’art et la condition humaine. À travers ses œuvres, le sculpteur peut susciter des émotions variées, que ce soit la contemplation, la réflexion, l’émerveillement ou parfois même la provocation. Il est ainsi un créateur capable de transformer des matériaux bruts en symboles puissants, en capturant l’essence de l’humanité, du monde naturel ou de concepts abstraits à travers l’art.

Installé au Musée National Boubou Hama à Niamey, M. Ali Boukari, un sculpteur connu pour ses représentations d’animaux en bronze, continue de marquer le domaine de la sculpture par sa capacité à simplifier les formes tout en conservant l’essence de l’animal. Cet artiste se consacre à la création d’œuvres tridimensionnelles, en manipulant différents matériaux pour donner forme à ses idées. Son travail peut commencer par une idée abstraite ou une observation du monde qui l’entoure, qu’il cherche ensuite à traduire en volumes, lignes et textures. La sculpture, qu’elle soit figurative ou abstraite, demande à la fois une grande maîtrise technique et une profonde capacité à exprimer des émotions ou des concepts à travers la matière. Selon les explications données par M. Ali Boukari, le processus de création d’une sculpture en bronze est complexe et comprend plusieurs étapes. D’abord, la création d’un modèle initial en cire, en argile ou en un autre matériau malléable. Ce modèle est ensuite recouvert d’un moule, généralement en sable ou en plâtre, qui est chauffé pour faire fondre la cire ou l’argile. L’étape suivante est le coulage du bronze liquide dans le moule, suivie d’un refroidissement et d’une finition détaillée. Ce processus, connu sous le nom de «cire perdue», permet de produire des sculptures en bronze d’une grande précision et complexité. Travaillant souvent sur des sujets tels que des chevaux, des lions, des éléphants, gazelles, singes, hippopotames, il parvient à donner une véritable énergie à ses œuvres en cherchant à retranscrire leurs émotions et leur caractère. Ses œuvres sont caractérisées par des lignes fluides et une grande attention aux détails physiques, ce qui lui permet de donner une vie palpable à ses créations. Son travail est un excellent exemple de la fusion entre l’art du bronze et la représentation d’animaux sauvages dans une forme esthétique et réaliste. Il participe régulièrement au Salon des artistes décorateurs africains et européens et arrive à émerveiller le public avec ses œuvres.
Cependant, à partir des années 1990, la sculpture a traversé une période difficile, principalement en raison de l’insécurité qui a sévi dans le Nord du pays et des troubles sociaux qui ont limité non seulement l’accès aux matériaux mais aussi la visite des touristes qui sont les principaux clients, au Niger. Pour écouler ses articles, il prenait l’avion pour se rendre en Europe.
Un regain d’intérêt qui donne un nouveau souffle au métier de sculpteur
Ces derniers temps, l’intérêt pour la sculpture en bronze renaît, notamment avec l’arrivée du CNSP au pouvoir. « Les nouvelles autorités accordent beaucoup d’importance à nos œuvres car, elles nous confient les marchés pour l’embellissement de la ville notamment au niveau des différents ronds-points de la capitale », se réjouit M. Ali Boukari. Il est, en effet, le seul qui tient encore avec trois jeunes apprenants. « Nous sommes peu nombreux et les autres ont préféré abandonner la sculpture pour se lancer dans la bijouterie ». En cas de forte demande, M. Ali fait appel aux autres sculpteurs qui ont abandonné l’activité pour lui prêter main forte.

En plus de la sculpture en bronze, il y a la sculpture sur bois qui est aussi un art ancestral, alliant la créativité humaine à la beauté naturelle du bois. On trouve la taille directe qui utilise des gouges, des ciseaux et des maillets pour créer des formes en relief ou en ronde-bosse. Le tournage sur bois, effectué à l’aide d’un tour, permet de réaliser des pièces symétriques et arrondies. La marqueterie consiste à assembler des placages de bois de différentes essences pour créer des motifs décoratifs. Les finitions, telles que la patine, la cire ou le vernis, servent à sublimer l’œuvre et à protéger le bois. Elles sont en effet présentes dans divers contextes, tels que les musées, les galeries, les jardins publics et les parcs. Elles sont également intégrées à la décoration intérieure sous forme de meubles et d’éléments décoratifs sculptés. La sculpture sur bois demeure une source inépuisable d’inspiration et d’expression, reflétant l’ingéniosité et la créativité humaine à travers les âges.

M. Adamou Djibo, spécialisé dans la sculpture sur bois, un art ancestral qui consiste à façonner le bois pour créer des œuvres d’art, des objets utilitaires ou décoratifs, explique que les techniques sont variées et dépendent souvent du style recherché. Il a fait ses premiers pas dans la sculpture en 1982 et s’est formé auprès de Sékou Keita qui, avec le poids de l’âge, a fini par abandonner le travail. Actuellement, Adamou Djibo travaille seul sans aucun apprenant. « Les enfants d’aujourd’hui ne veulent pas apprendre le métier, ils aiment la facilité, avoir de l’argent sans fournir beaucoup d’effort. Je voulais bien transmettre mon savoir à la jeune génération mais hélas », regrette-t-il. Son travail portant sur les sujets tels que : les porteuses d’eau ; les femmes africaines ; les statues ; les animaux sauvages, se caractérise par une maîtrise intuitive du bois, avec des formes organiques et une finition particulière. Son travail reflète les influences des différentes cultures africaines, et il est reconnu pour sa capacité à fusionner les styles traditionnels et modernes dans ses sculptures. Mais ses œuvres sont parfois confondues à des statuettes. « Souvent, les parents empêchent à leurs enfants de toucher même à mes œuvres qu’ils qualifient d’œuvres de sorcellerie. Mais, moi ,mes œuvres sont destinées à la décoration et si la personne décide de faire une utilisation autre que la décoration, cela n’engage qu’elle », dixit M. Djibo.
Ces deux artistes illustrent la diversité et la richesse de la sculpture à travers les époques et les cultures, chacun apportant une perspective unique à cet art.
Aïchatou Hamma Wakasso (ONEP)