Dangnakou est un village de la commune rurale de Yélou dans le département de Gaya. Dans ce village, les principales activités socio-économiques sont l’agriculture, l’élevage, la pêche et l’artisanat. La fertilité particulière du sol fait que les habitants s’intéressent à la production du manioc, l’une des principales cultures de rentes des villageois. La rentabilité de cette activité a poussé le jeune Moussa Dahirou Salah à monter une unité de transformation de manioc en d’autres produits dérivés à savoir le gari, le tapioca, l’atiéke, appelée ‘’Entreprise Garin Niger’’ (EGN). Cette panoplie de produits dérivés est une véritable alternative aux producteurs qui sont parfois confrontés à un problème de mévente ou de conservation de leur excédent de manioc.
Une valeur ajoutée qui permet au jeune entrepreneur d’asseoir sa petite unité de transformation et de créer des emplois pour les jeunes de sa communauté. Toutefois l’insuffisance de la matière première couplée à la cherté des machines de transformation et des intrants agricoles crée un impact négatif et pas des moindres sur la rentabilité et la pérennisation de cette activité tout au long de l’année.
Un défi de taille que le jeune entrepreneur et son équipe s’efforcent de relever afin d’atteindre le but visé.
Titulaire d’une Licence en Psychologie, Moussa Dahirou Salah dit avoir monté son entreprise en raison d’une part, de la forte production du manioc par les paysans et d’autre part, le constat déplorable du pourrissement de ces tubercules faute de débouchés pour les producteurs.
Une opportunité pour les producteurs
Les habitants du village de Dangnakou font de la culture du manioc une des activités majeures leur permettant d’avoir des revenus et de subvenir à leurs besoins.
Moussa, le promoteur de l’entreprise Garin Niger ‘EGN’ exploite son propre champ de manioc sur une superficie de 8 hectares. Mais il se ravitaille aussi auprès des cultivateurs au prix de 4.500 francs CFA à 5.500 francs CFA le sac de manioc, en fonction des saisons. Comme l’explique M. Moussa, la transformation du manioc en produits finis est un processus permettant de convertir la racine de manioc, ce tubercule issu d’une plante tropicale et riche en amidon, en divers produits alimentaires. Le processus de transformation passe par plusieurs étapes. La première est la récolte et l’épluchage du tubercule.
Les paysans déterrent minutieusement les racines du manioc qui sont ensuite épluchées avant d’être traitées pour les débarrasser des substances toxiques qu’elles contiennent, notamment des glycosides cyanogènes. La deuxième phase du processus consiste à laver et à hacher le tubercule. Selon M. Moussa, les racines épluchées sont lavées pour éliminer les impuretés, puis hachées ou râpées en petits morceaux pour faciliter l’étape de fermentation. Ce qui permet d’améliorer le goût, la texture et la digestibilité du manioc. Elle peut, en effet, durer de quelques heures à plusieurs jours, selon la qualité du produit final souhaité.
Il y a ensuite l’étape du pressage. A ce niveau le manioc râpé ou broyé est pressé pour éliminer une partie de l’eau afin de réduire le niveau de toxine. Ce pressage aide également à obtenir une pâte plus sèche, particulièrement utile pour l’obtention de certains produits comme le gari. La pâte de manioc ainsi obtenue est séchée pour obtenir une texture plus stable et pour prolonger la durée de conservation. Le séchage peut se faire au soleil ou dans des séchoirs, confie le jeune Moussa Dahirou.
La pâte séchée et broyée pour produire une farine fine est utilisée dans les boulangeries comme ingrédient dans l’élaboration de diverses recettes.
S’agissant du gari et du tapioca, Moussa Dahirou souligne que le manioc est grillé dans de grandes poêles après fermentation et séchage, lui donnant une texture croustillante. Pour le tapioca, le manioc est transformé en petites billes d’amidon, souvent utilisées pour les desserts ou comme épaississant dans les soupes.
Compte tenu des saisons, la production du manioc est périodique. « Je produis entre 15 à 20 sacs de gari et tapioca par jour, en période de production et je vends le sac entre 28.000 francs CFA et 30. 000 francs CFA dans le mois de mars jusqu’à juin. Mais l’impact de la chaleur sur la production peut augmenter la valeur du sac qui peut passer à 45 000 francs CFA.
La transformation du manioc permet non seulement de valoriser cette culture, mais également d’éliminer les composants toxiques et améliorer la durée de conservation. Elle offre en plus une source importante de revenus pour les agriculteurs, revendeurs et restaurateurs.
La ville de Niamey : principal déboucher
Les produits finis, comme le gari, la farine de manioc ou le tapioca sont emballés pour être acheminés et vendus dans les grands centres urbains. À Niamey par exemple, les vendeurs des produits dérivés de la transformation du manioc occupent la ruelle du quartier nouveau marché. On les voit assis à l’ombre des parapluies, devant des grands bassins remplis soit de tapioca, gari ou farine de manioc, des sacs superposés les uns sur les autres à l’arrière des étals. Mme Olivia est une revendeuse. Elle explique qu’avant la fermeture des frontières, les produits étaient abondants et à moindre coût. Mais depuis ces événements, l’approvisionnement en gari, tapioca, farine est très compliqué, entraînant, du coup, la hausse des prix.
Aujourd’hui, bien qu’appréciés par la population, les prix de ces produits ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Actuellement, le prix de la tasse de gari est à 1.500 FCFA, le tapioca consommé froid est à 1750 FCFA, le tapioca à l’eau chaude à 1500 FCFA contre 1000 FCFA la tasse du gari et de tapioca avant. Cette commerçante ajoute que par le passé, le sac de gari coûtait 50.000 FCFA voire 60.000 FCFA ; le sac de tapioca à 45.000FCFA, mais aujourd’hui le grand sac de gari, de tapioca coûte 90.000 FCFA. « Vraiment, ça serait magnifique pour nous, s’il existe une unité de production locale. Ça nous faciliterait l’approvisionnement et nous épargnerait les tracasseries car, il nous arrive d’être en rupture », affirme Mme Olivia.
Le gari est aussi un élément important pour les restaurateurs qui exercent dans la ville de Niamey et à l’intérieur du pays. Ibrahim est restaurateur dans l’enceinte de l’Université Abdou Moumouni de Niamey où il prépare des plats à base ou avec du gari. Il déclare que la hausse des prix impacte fortement son commerce. A titre illustratif, il explique que par le passé, les clients pouvaient manger à satiété avec seulement la somme de cent cinquante (150) francs CFA dont le haricot de cent (100) francs et gari de cinquante (50) francs. « Mais de nos jours, la rareté du produit fait que le plat est passé à deux cent (200) francs CFA », souligne le jeune Ibrahim.
Moumouni Idrissa Abdoul Aziz (Stagiaire)