Qui a déjà dit que le fric, c’est chic ? De nos jours, avec tous les effets néfastes de l’emprise du goût prononcé pour l’argent sur les rapports entre les gens, on peut bien en douter. Dans la vie quotidienne des citadins, le pouvoir de l’argent a pris une telle ampleur qu’il a corrompu presque toutes les valeurs sociales. En effet, le moindre service rendu au prochain se paie, rubis sur ongle, en pièces ou en billets de banque. Même les plus petits enfants n’en sont pas épargnés. Aussi, vous envoyez un enfant vous acheter quelque chose chez le boutiquier d’à côté, le chérubin trouvera le moyen de vous le faire payer. Et certains ne se gêneront pas pour vous rétorquer : ‘’tana cha may..’’, autrement dit ‘’ça consomme du carburant’’, comme pour dire que l’énergie fournie doit être compensée. Vous sollicitez un groupe de gamins en train de jouer pour vous donner un coup de main pour pousser votre vieille guimbarde qui refuse de démarrer, ils te colleront une facture dans le genre ‘’vous nous payez combien ?’’.
De simple moyen d’échanges commerciaux, l’argent est devenu, par ces temps qui courent, une véritable fin en soi. C’est, on peut dire, la chose la plus convoitée. Tant et si bien que ces coupures de papiers à l’odeur forte et ces petites pièces rondes sont en passe de ruiner les rapports humains. Désormais, c’est l’argent qui régule les liens de parenté, d’amitié, et même l’atmosphère du foyer conjugal. C’est encore l’argent qui détermine le rang social, qui vous donne droit aux honneurs, et qui sert de clé pour vous ouvrir toutes les portes. Et voilà pourquoi tout le monde se lance, dans un moment d’ensemble, dans une sordide ruée vers la fortune.
Le hic avec le fric, c’est que son irrésistible tentation sur les hommes se traduit par un bouleversement total de nos valeurs sociales essentielles, en l’occurrence la solidarité et la générosité qui caractérisaient nos sociétés ancestrales. Ainsi, il y en a qui ne reculent plus, et ils sont nombreux, devant les moyens de se faire beaucoup d’argent ! Et quand on arrive à en amasser à profusion, il faut trouver les moyens de le mettre à l’abri du regard et de la convoitise des envieux. Ce qui est une autre paire de manches…Car, ceci expliquant cela, à la ‘’boulimie financière’’ des uns, est venue se greffer l’audace des escrocs et autres malfrats de tous genres tapis dans l’ombre, prompts à vous dépouiller de votre fortune.
Aussi, à cause de cette forte emprise que l’argent exerce sur les hommes, la confiance n’est plus de ce monde. Devant toute cette force corruptrice que le fameux billet de banque exerce sur l’humanité, on peut regretter les temps immémoriaux du fameux cauris africain ou même du troc qui avaient caractérisé toute la noblesse des échanges commerciaux.
Assane Soumana(onep)