Le sarkin wassa du sultanat, déguisé en bouffon, ...
La Cour du Sultanat de l’Aïr a servi de cadre, le 10 mars 2025, dans la soirée pour le lancement du traditionnel « Taché », ou le carnaval nocturne orgénisé uniquement pendant le mois de Ramadan. C’est le Sultan de l’Aïr qui a donné le coup d’envoi de cet événement socioculturel et religieux conformément à la tradition. Conduit et coordonné par la troupe culturelle du Sultanat de l’Aïr sous la supervision du Sarkin Wassa dudit Sultanat, ce carnaval a débuté ainsi ses tournées nocturnes et ceci jusqu’à la fin du jeûne. Un événement qui a mobilisé plusieurs dizaines de personnes pour la plupart des jeunes filles et garçons qui accompagnent les carnavaliers dans leur parcours.
Ainsi, comme le veut la tradition ici à Agadez, après le coup d’envoi au Sultanat, la première soirée est consacrée aux autorités administratives et à certaines personnalités dont les notables de la ville. C’est ainsi qu’après le sultanat, le carnaval s’est transporté à la résidence du Gouverneur de la Région d’Agadez, le Général de Brigade Ibra Boulama Issa, et chez le Secrétaire Général de la région, M. Souleymane Seidou Boulhassane. Tout au long du trajet, ce sont des chants et des danses sous le rythme sonore d’instruments de musique traditionnelle qui agrémentent la soirée nocturne. En effet, lors du lancement de cet événement, le chef du groupe, le Sarkin Wassa du Sultanat, Babalé Faya, personnage principal, s’est déguisé en bouffon en exécutant des pas de danse devant le Gouverneur et le Secrétaire Général qui ont été éblouis par la danse magistrale du chef de groupe.
Le Taché est une vieille tradition dans la culture musulmane qui est célébrée pendant le mois de Ramadan, généralement à partir de la 2ème décade du mois. Selon plusieurs explications, cet événement a un fondement. D’abord le choix de la période. Ici, on estime qu’après plus de 10 jours de jeûne, le corp humain commence à s’affaiblir et c’est l’occasion de passer dans les rues, et maison par maison, pour souhaiter une bonne rupture de jeûne mais aussi pour redonner de l’énergie aux fidèles musulmans. L’humour qui accompagne cette initiative a pour objectif de donner du sourire aux jeûneurs. En retour, partout où le carnaval passe, dans les maisons ou devant les boutiques, il reçoit des cadeaux de plusieurs natures et des articles divers (savons, sucre, céréales, habits, etc.). A Agadez, ce carnaval est organisé depuis plusieurs générations. A chaque passage, les anciens se souviennent ainsi de leur temps.
Ce jour-là, c’est aux environs de 21 heures que la mascotte déguisée en bouffon et dans un habillement spécifique au jeu, suivi d’une importante foule des jeunes, a fait son entrée au Sultanat. Assis sur son fauteuil royal, le Sultan entouré de ses notables, a accueilli le Sarkin Wassa et sa compagnie. Après quelques chants et danses, le Sarkin Wassa s’est approché du Sultan et a demandé l’autorisation et la bénédiction de Son Altesse pour commencer le « Taché ». « Votre Altesse, recevez nos respectueuses salutations et honneurs. Nous voilà, cette année encore devant vous pour solliciter votre bénédiction afin que le Taché débute à partir de ce soir. Nous sommes à votre disposition pour les conseils et les autres observations », a dit le Sarkin Wassa.
En réponse, le Sultan a accepté la demande et a souhaité une bonne chance à la troupe. « Vous avez mon autorisation et ma bénédiction. Le Sultanat et moi-même sommes contents et vous avez notre soutien. Je vous invite à veiller à la bonne conduite de ces soirées dans la discipline et le respect. Bonne chance ! », a ordonné le sultan.
Sur les routes, les voitures, les motocyclistes, les commerçants boutiquiers, les piétons, tout le monde s’arrête pour contempler. Le contexte oblige, plusieurs spectateurs font usage de leur téléphone smart pour capturer quelques images et vidéos.
Selon le Conseiller en communication du Sultanat de l’Aïr, l’ancien Maire de la ville d’Agadez, M. Abdourahamane Aboubacar Tourawa, le Taché est un héritage des traditions musulmanes. Il est spécifiquement observé pendant le mois béni de ramadan. Le Taché joue un rôle important dans la vie des jeûneurs. « Vous imaginez, après la première décade du mois, le corps commence à s’affaiblir. Donc le Taché intervient soit pour galvaniser les fidèles, soit pour leur remonter le moral à travers l’humour. Le Taché a aussi une autre valeur, celle de renforcer la cohésion sociale, à travers le cousinage à plaisanterie entre les cousins » a-t-il souligné.
Ali Maman, ONEP-Agadez
