Le 14 octobre 2024, le Chef de l’État, Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, le Général de Brigade Abdourahamane Tiani a signé l’ordonnance relative à l’importation, la production et la commercialisation du ciment 32.5 au Niger. Quelles sont les mesures prises par le ministère du Commerce et de l’Industrie pour faire respecter cette loi et rendre disponible le ciment ?
Il faut rappeler que suite, aux inondations survenues dans notre pays et pour permettre aux citoyens de reconstruire leurs habitats, le Chef de l’Etat, le Président du Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie, SE le Général de Brigade Abdourahamane Tiani, a signé une ordonnance déterminant le régime fiscal dérogatoire applicable aux activités d’importation, de production et de commercialisation du ciment gris CEM II 32.5 R, pour pouvoir arriver, plus tard, à travers un arrêté conjoint signé entre le Ministre du Commerce et de l’Industrie et le Ministre de l’Economie et des Finances, à fixer le prix de la tonne de ce type de ciment par région.
Cette réduction combinée à la non importation de ciment étranger dans notre pays a suscité un engouement de la part des citoyens au point où, à chaque moment, à chaque instant, et en tout lieu, chacun cherche à s’approprier du ciment qui, pour construire dans l’immédiat, qui pour achever son chantier, qui pour faire un approvisionnement pour le futur parce que la mesure prise s’étale sur une période de 12 mois.
Il est important de noter que les sociétés de cimenterie vendent uniquement le ciment aux grossistes agréés auprès d’elles et non aux détaillants. Dans le prix fixé par tonne, il était inclus la marge bénéficiaire du grossiste qui pourrait la partager avec son détaillant qui relevait exclusivement de son contrôle.
Mais, nous avons constaté que les grossistes ne veulent pas partager cette marge qu’ils disposent par tonne avec leurs détaillants ce qui fait en sorte qu’ils vendent à leurs détaillants aux prix de base que nous avons fixés. Ainsi, une dizaine de jours après, nous étions obligés de faire une réunion de recadrage avec ces grossistes, ces sociétés de cimenteries, ces détaillants et les transporteurs. A l’issue de cette réunion, tous les acteurs de cette chaîne ont bien compris la nécessité de se conformer à l’arrêté pris par le Gouvernement. Dans le même cadre, un protocole d’accord relatif au transport du ciment CEM II 32.5 R fut signé entre notre Ministère, le Ministère des Transports et de l’Equipement et le Collectif des Syndicats des Transporteurs.
Par ailleurs, lorsque nous avons constaté à quelques endroits, le non-respect des dispositions de l’Arrêté, le Ministère du Commerce et de l’Industrie à travers ses services de contrôle a déployé ses Agents Assermentés sur le terrain afin de garantir une bonne application de la mesure. Ainsi, huit (08) équipes de contrôle sillonnent la ville de Niamey dans la journée et quatre (4) autres équipes la nuit, travaillant du lundi au dimanche incluant même les jours fériés.
Aux deux (02) points d’entrée de Niamey à savoir Sorey et Niamey 2000, deux équipes font la permanence, en collaboration avec les Agents du Fonds d’Entretien Routier (FER) et les Agents de force de défense et de sécurité, qui, lorsque les camions transportant le ciment arrivent, prennent leurs pièces et les consignent. Lorsque ces camions arrivent chez le grossiste indiqué, nos Agents restituent ces mêmes pièces à leur chauffeur et procèdent immédiatement à la vente du ciment et,ce, en collaboration avec le grossiste destinataire de la quantité transportée. Cela veut dire que nous avons le contrôle quotidien sur la quantité de ciment vendu chaque jour. Autre chose également, en matière de contrôle, déjà à partir des usines MCC de Malbaza et MANGO ciment de Badaguichiri, nous recevons régulièrement les listes des camions avec numéro d’immatriculation, le tonnage, le point de vente et le grossiste pour lequel le camion est affecté.
À ce jour, quel est le nombre de commerçants sanctionnés pour non-respect de cette mesure ?
Lorsqu’il y a eu quelques revendeurs qui ne respectaient pas le prix, nous avons pris des mesures de fermeture de treize (13) points de vente (grossistes et détaillants). Hormis la décision de fermeture, chaque contrevenant a payé une amende d’un million (1.000.000) de FCFA à l’Etat du Niger versée directement au Trésor par notre régisseur.
Maintenant, d’autres qui étaient rentrés pour la recherche de profit dans l’activité de vente du ciment ont dû abandonner d’eux-mêmes au point où, aujourd’hui, on peut relativement affirmer que le secteur de la vente du ciment est assaini. C’est pourquoi, les gens qui estiment qu’il n’y a pas de ciment disponible à Niamey, il faut simplement leur rappeler que c’est cette pagaille qui avait prévalu dans la vente du ciment à son temps qui n’existe plus aujourd’hui. Donc ,auprès des grossistes certifiés, le ciment est vendu chaque jour en fonction de la quantité livrée à chaque grossiste par région et aux prix fixés par le Ministère du Commerce et de l’Industrie qui déploie énormément de moyens financiers, matériels et humains pour honorer l’engagement du Chef de l’Etat, à qui le compte rendu est fait régulièrement.
Les commerçants se plaignent de l’acheminement du ciment de l’usine vers la capitale. Certains avancent que les transporteurs refusent ce marché depuis que les prix du transport ont été fixés, se plaignant de rouler à perte. Que pouvez-vous nous dire par rapport à cela ?
D’abord, il faut rectifier quelque chose, personne ne fait une activité commerciale pour rouler à perte. Nous connaissons le prix de cession de la tonne à l’usine, le prix de transport et la marge bénéficiaire du grossiste, c’est sur cette base que le Ministre du Commerce et de l’Industrie et celui des Finances ont fixé, d’un commun accord, le prix de la tonne de ce type de ciment sur l’ensemble du territoire national. Aujourd’hui, il y a ceux, parmi eux (les grossistes vendeurs de ciment) qui certifient qu’ils n’ont jamais réalisé un chiffre d’affaires aussi important qu’avec la prise de cette mesure.
Pour mieux comprendre cette situation, il faut dire qu’avant la prise de la mesure de réduction du prix de ce ciment, certains grossistes font 30 à 45 jours pour vendre 10 tonnes de ciment, mais aujourd’hui, le ciment s’écoule en quelques heures, quelle que soit la quantité. En plus, les vendeurs de ciment gagnent entre 90.000 à 100.000 FCFA de bénéfice par camion. Comment ,entre nous, parler de perte ici ?
Cependant, l’Etat a consenti d’énormes sacrifices en renonçant entièrement à toutes les taxes, les impôts et autres redevances liées à l’activité de la vente du ciment, depuis sa production, jusqu’à sa commercialisation. Ceci prouve à quel point cette mesure a été réfléchie et prise de manière participative, donc nous sommes étonnés aujourd’hui, de constater qu’une poignée de commerçants affirment ne pas faire de bénéfice. Cette attitude témoigne de l’esprit mercantiliste développé par celle-ci depuis belle lurette.
La tonne du ciment à l’usine est vendue à 45.000 FCFA selon les commerçants, en y ajoutant le prix de transports de 8.000FCFA, plus 10.000 FCFA de la mairie à l’entrée de la ville, plus les frais de déchargement de la tonne qui varient de 750 FCFA à 1.000FCFA ; ils estiment le cumul à plus de 60 000 francs, pour la tonne qui doit être revendue à 55 000 francs sur le marché. Telles sont les raisons avancées par les commerçants de la ville de Niamey pour expliquer la pénurie du ciment 32.5 qui sévit dans la ville. Que peut dire le ministère sur ce point ?
Ce que le Ministère du Commerce et de l’Industrie dira est simple ; c’est un faux calcul, lorsqu’ils parlent de cette taxe de 10.000 FCFA de la mairie, il faut préciser que c’est 10.000 FCFA par camion et non par tonne qui constituent la taxe d’entrée collectée par la municipalité. Ici, par exemple à Niamey, lorsqu’on fait le calcul : 45.000FCFA la tonne cédée à l’usine plus 8.000 FCFA de transport, ça donne 53.000 FCFA, avec 2.000 FCFA de marge pour le grossiste, ça fait les 55.000 FCFA. Donc la tonne peut bel et bien être vendue à 55 000FCFA à Niamey. C’est sur la base de ce calcul que les prix de la tonne du ciment ont été fixés, de concert avec les acteurs concernés c’est-à-dire les sociétés de cimenterie, les grossistes agréés auprès de ces sociétés, la Direction Générale des Impôts (DGI) et la Direction Générale des Douanes (DGD), sous la supervision du Ministère du Commerce et de l’Industrie.
Lorsque les gens voulaient soudoyer les uns et les autres pour dire que la mairie prend 10.000 FCFA qui est une taxe d’entrée dans la ville et par camion, j’insiste là-dessus. Pour un camion qui transporte 50 tonnes de ciment, on fait 10.000 FCFA/50 tonnes, combien ont été pris sur la tonne, faites le calcul, ça ne dépasse pas 200 FCFA, donc arithmétiquement si vous intégrez ce montant, le prix s’élève à 53 200 FCFA. A noter au passage que, ce sont des camions de 45 à 50 tonnes que les grossistes vendent, et il y en a ceux qui vendent jusqu’à 2, 3, 4, 5 camions par jour. C’est pourquoi nous sommes très contents que cette question soit posée afin que nous levions l’équivoque liée à cette interprétation tendancieuse qui pourrait induire les consommateurs et autres activistes en erreur.
Quelles sont les dispositions que le ministère compte prendre pour que le produit soit en abondance sur le marché afin de permettre aux populations de bénéficier de cette mesure d’assouplissement ?
Aujourd’hui, ce sont des dizaines de milliers de consommateurs qui sollicitent du ciment chaque jour. Or, nous ne disposons que de deux usines de production de ciment au Niger avec des capacités limitées. Cela crée un engouement qui fait en sorte qu’il y a insuffisance du ciment sur le marché, consécutivement à la demande qui est plus forte que l’offre. Il faut distribuer ce ciment dans toutes les régions du Niger, la réduction du prix du ciment a fait en sorte que même ceux qui ne s’intéressent pas au ciment ont pris goût à s’y intéresser. Il n’y a jamais eu de rupture de production, il n’y a jamais eu de rupture d’approvisionnement du ciment, c’est le nombre des personnes qui attendent ce ciment qui a explosé, au point où, certains pensent qu’il n’y a pas de ciment. Au niveau du Ministère du Commerce et de l’Industrie, nous faisons un tableau national du ciment vendu par jour sur l’ensemble du territoire national et nous dressons et adressons un compte rendu à qui de droit chaque jour. Nos équipes de contrôle travaillent du lundi au dimanche et même les jours fériés afin que nous puissions contribuer à la satisfaction des consommateurs, pour lesquels la décision a été prise, qui semblent être exigeants de plus en plus, et nous comprenons cet état d’esprit. Nous les invitons à se référer aux grossistes vendeurs du ciment qui sont disposés à les accueillir et à les servir en fonction de la quantité disponible et de leur ordre d’arrivée.
Récemment, nous avons tenu une réunion avec tous les acteurs de la chaîne de production et de distribution du ciment, chacun respectivement s’était réjoui de la mesure qui a pris forme sans obstacle aucun. Pour terminer, nous rassurons nos concitoyens que le ciment CEM II 32.5 R continuera à être produit et vendu aux prix que nous avons fixés. D’ores et déjà, Incha Allah, une troisième cimenterie verra le jour à Tamaské dans les prochains mois conformément à la lettre de mission qui nous a été confiée par le Chef de l’Etat et à son engagement ferme d’industrialiser le Niger.
Interview réalisée par Hamissou Yahaya (ONEP)