
M. Hama remplit ses bidons à la borne fontaine de Saguia
Au Niger, les marchands ambulants représentent une composante essentielle de l’économie informelle. Ces vendeurs jouent un rôle crucial dans la vie quotidienne des Nigériens en rendant accessibles leurs services. Pour bon nombre d’observateurs, cette activité est une alternative au chômage qui gangrène la jeunesse. Avec des investissements initiaux souvent modestes, les vendeurs d’eau ambulants proposent des services à leurs clients. Les revenus issus de cette activité leur permettent de subvenir à leurs besoins ainsi qu’à ceux de leurs familles. Cependant, leur situation économique reste précaire au regard de la nature même de l’activité.
En effet, malgré l’implantation des châteaux d’eau, les vendeurs d’eau ambulants communément appelés « Garoua » jouent un rôle primordial dans la ville de Niamey. Ils continuent toujours d’alimenter, d’être à la rescousse de certains habitants de la ville qui ne disposent pas de robinet dans leurs concessions. C’est le cas de M. Hama, la cinquantaine et père de famille qui exerce cette activité depuis une trentaine d’années. « J’exerce cette activité depuis des années. J’ai actuellement 29 ans d’expérience dans ce domaine. Je le fais par passion, et je suis fier de le faire. Depuis mon enfance, personne ne m’a obligé à le faire. Quand j’étais tout petit, je voyais quelqu’un de notre quartier l’exercer. C’est partant de cette observation que je me suis lancé dans ce métier », a-t-il confié.
Parlant de son métier, le vendeur d’eau ambulant explique que c’est un travail harassant qui demande beaucoup d’énergie et de patience face à certains clients qui tiennent des propos déplacés envers les vendeurs d’eau des quartiers. « Chaque jour, après la prière de l’aube, je m’apprête pour aller au niveau de la fontaine, remplir mes bidons et commencer à servir mes clients. Je sers les habitants qui n’ont pas de robinet dans leurs concessions. Mes clients sont ceux du quartier Saguia et de la Cité Sénégalaise. Après avoir fini avec eux, je désintéresse mes clients qui ont des salons de coiffure et autres boutiques. Par jour, ce sont des allers et retours incalculables. Je débute à 7 heures du matin pour finir à 20 heures, des fois même au-delà. Tout dépend des jours. Parmi mes abonnés, il y a ceux à qui je livre de l’eau chaque jour, chaque deux ou trois jours », explique Hama.
En ce qui concerne le ravitaillement en eau, le vendeur dit qu’à chaque tour, il y a un montant spécifique qu’il verse auprès du gérant de la pompe. « A chaque tour, je verse 150 FCFA. Par exemple, si c’est dix tours, à chaque remplissage je donne le montant correspondant. Mais, il y a des jours où c’est morose. Là, il va devoir comptabiliser et attendre la fin de la journée pour le versement. Il y a des clients qui, dès que je finis ma mission, me donnent mon argent sur place. D’autres, me font attendre 24 heures ou 48 heures. C’est comme ça que notre activité marche. On nous cède le bidon de 20 litres à 15 F pour le revendre à 25 F, et le tonneau (de dix bidons) à 500 FCFA », dit-t-il.
On se rend compte que le métier de ‘‘gaoura’’ nécessite un effort physique et une bonne dose de patience à l’égard de certains clients qui méprisent le métier. Cela s’ajoute au risque qu’ils encourent chaque matin en se faufilant sur les goudrons et les ruelles exiguës des quartiers périphériques. Ils exposent leur vie à des risques multiples. « C’est un travail à risque que nous effectuons. Puisque, à tout moment, un véhicule peut nous renverser, surtout avec les gens qui ne roulent pas doucement », déplore-t-il, avant d’ajouter que « c’est un travail bénéfique pour moi, car c’est dans cette activité que j’arrive à subvenir à mes besoins et ceux de ma famille. Dieu merci, c’est à travers ce business que je me suis marié », a confié M. Hama.
M. Abdourahamane Hamadou est le gérant de la pompe qui est au quartier Saguia. « C’est une pompe qui appartient à notre père. Elle a été installée en 2014. En dehors des Garouas, les gens du quartier et des alentours qui n’ont pas de robinet viennent pour se procurer de l’eau afin d’effectuer leurs différentes tâches. Pour ce qui est de la procédure, il y a des Garouas qui payent avant même de prendre et d’autres ne règlent le gérant qu’à la fin de la journée. Les Garouas servent leurs clients potentiels. Ils commencent leur travail tôt le matin. A chaque tour, ils reversent la somme de 150 FCFA », a fait savoir le gérant.
Pour lui, c’est un travail qui s’effectue sans aucun problème. « Il suffit juste de se comprendre et tout va dans l’ordre. Je trouve cette activité bénéfique car, c’est dans ça que j’arrive à subvenir à certains de mes besoins et ceux de ma famille. Dieu merci, nous lui rendons grâce. Mes clients garouas et moi-même trouvons notre compte. Parmi eux, il y a des garouas qui, même pendant la saison des pluies, ne partent pas au village pour cultiver. Ils préfèrent rester exercer leur activité », dit-t-il.
S’agissant du prix, le gérant précise que tout dépend de la quantité. « Pour ceux qui viennent remplir le bidon de 25 litres, ils payent 25 FCFA l’unité, les deux seaux se vendent aussi à 25 FCFA. Pour les garouas, je leur cède le bidon de 20 litres à 15 F parce qu’ils le revendent à 25F, soit un bénéfice net de 10 F. En ce qui concerne les entraves, nous sommes surtout confrontés à la facture d’eau qui est des fois à la hausse », a souligné M. Abdourahamane.
M. Abdoulaye Hama est un habitant de la Cité Sénégalaise, transportant sur sa moto un bidon de 25 litres. « Je viens de temps en temps pour remplir le bidon avec l’eau du robinet. L’eau que je viens prendre, c’est juste pour boire. Nous utilisons l’eau du forage pour les tâches ménagères. Dans notre quartier, il n’y a pas une disponibilité permanente d’eau. Et les forages ne couvrent pas tout le monde. Nous rencontrons beaucoup de difficultés. Du coup, nous sommes obligés de venir payer », a-t-il déploré.
Farida. A. Ibrahim (ONEP)