Le ministre de la Justice et des droits de l’homme, Garde des Sceaux, M. Alio Daouda et le ministre du Pétrole, M. Barké Bako Mahaman Moustapha ont conjointement animé un point de presse, hier jeudi 6 juin 2024, pour apporter des éclaircissements sur les inspecteurs nigériens arrêtés illégalement par les autorités béninoises. Dans leurs explications, les deux ministres ont démontré que les fonctionnaires nigériens étaient entrés en terre béninoise en toute légalité dans le cadre des accords bilatéraux. Pour le Niger, l’arrestation de ses inspecteurs viole tous les accords signés entre les parties prenantes, dont le Bénin sur le transport du brut et l’exploitation du pipeline. C’est pourquoi, les deux ministres ont annoncé les mesures légales qui seront prises par l’État du Niger pour défendre ses intérêts, dont la saisie de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA). En outre, le Niger n’exclut pas de fermer le robinet de son brut à partir de la station initiale de Koulélé.
Selon les explications du ministre du Pétrole, le jeudi 30 mai 2024, des inspecteurs nigériens envoyés au Bénin pour contrôler les opérations de chargement du Melec sur le bateau ont été interpellés par l’armée béninoise puis transportés dans les locaux de la police. « Ces équipes étaient arrivées au Bénin régulièrement dans le cadre de leur mission. La société WAPCO avait été informée et elle en avait informé les autorités béninoises, tout comme lorsque le ministre béninois de l’Énergie, des mines et de l’eau était venu au Niger. Nous avions été prévenus par WAPCO Niger. Si nous, nous les avions accueillis comme les frères qu’ils étaient, au Bénin nos compatriotes ont été interpellés et arrêtés par les autorités », a indiqué Barké Bako Mahaman Moustapha.
Face à cet acte qui viole les accords qui lient l’État du Niger au Bénin dans le cadre de l’exportation du Brut, le ministre du Pétrole a indiqué que si les autorités béninoises décident d’empêcher à la partie nigérienne d’accéder aux installations pour contrôler les opérations de chargement, en vérifier la régularité, le Niger ne saurait accepter ce chargement. « Cependant, la CNPC et WAPCO ont entrepris des démarches auprès des autorités du Niger pour que le deuxième bateau puisse être chargé. Selon eux, puisque les autorités béninoises ont dit qu’elles acceptent que le bateau soit chargé, mais uniquement à ce que ce soit les chinois qui fassent l’opération, et pas de Nigériens, nous avons opposé une fin de non-recevoir à cette demande », a-t-il précisé.
Mais face à leur insistance, a-t-il poursuivi, et compte tenu des pertes importantes qe devait subir Wapco, sans compter nous autres, les expéditeurs, nous avons accepté que cette opération soit menée par WAPCO Niger et Bénin. Ainsi, parmi le personnel nécessaire pour mener cette opération, Wapco Bénin ne disposait que de deux ingénieurs pétroliers et aucun inspecteur. « Nous leur avions dit que nous allons temporairement mettre à leur disposition deux inspecteurs de chez nous, comme cela se fait », a confié Barké Bako Mahaman Moustapha. Ainsi, a expliqué le ministre « ils sont arrivés pour commencer les opérations de mesurage et de contrôle d’échantillon. La nuit, vers 21 h, j’apprends qu’ils sont arrêtés par l’armée. Les autorités béninoises disent que même si c’est WAPCO, si ce sont des Nigériens, ils ne pourront pas faire le travail. Vers minuit, la DGA de Wapco nous a assuré qu’ils n’ont subi aucun préjudice, aucune maltraitance. À l’heure où je vous parle, ils n’ont pas été libérés », a notifié le ministre du Pétrole.
« Le Chef de l’État nous a donné des instructions fermes. Si jusqu’à 17 h aujourd’hui, (NDLR jeudi 6 juin) nos équipes ne sont pas libres de leur mouvement et ne sont pas remis dans leur fonction d’inspecteurs de cette cargaison, nous allons arrêter la station initiale de Koulélé. Des dispositions sont prises pour que cela soit effectif. Non seulement le bateau ne pourra plus charger, mais nous n’allons plus envoyer notre pétrole dans le pipeline jusqu’à ce que les Béninois décident de respecter leur engagement et jusqu’à ce que le partenaire chinois les amène à respecter leur engagement. Parce que apparemment, c’est la seule partie qu’ils écoutent », a ajouté le ministre Barké Bako Mahaman Moustapha.
Pour sa part, le ministre de la Justice, Garde des Sceaux M. Alio Daouda a dressé la liste des dispositions des accords violées par le Bénin. Il a souligné que les agissements des autorités béninoises violent toutes les dispositions du chapitre III. Par ces dispositions, le Bénin s’était engagé, dit-il, à ne poser aucun obstacle à l’État du Niger pour acheminer le brut par le pipeline jusqu’à destination et à prendre toutes les dispositions pour qu’aucune menace, aucune entrave ne soit portée par qui que ce soit. Il en est de même des dispositions de l’article 9.2. « Le Bénin s’est engagé de façon absolue à permettre de construire et de transporter le pétrole nigérien. Mais aujourd’hui par ses agissements, il est en train de violer des dispositions, particulièrement en ce qui concerne le comptage des hydrocarbures. C’est une obligation contenue dans le chapitre 6 de l’accord bilatéral de coopération signé entre le Niger et le Bénin », a souligné M. Alio Daouda.
Ainsi, a ajouté le ministre de la Justice, en excluant la partie nigérienne, non seulement le Bénin viole les dispositions du contrat, mais permet aussi à la société chinoise d’agir seule et sans aucune contrepartie en matière de contrôle. « Et c’est en cela que nous avons estimé qu’au-delà du Bénin, même notre partenaire ne joue pas franc-jeu avec nous parce que dans les négociations de ce matin, la solution proposée par la partie chinoise est que nous les Nigériens, nous acceptons de ne pas être présents alors que le contrat qui est la loi de partie, impose au Bénin, au partenaire et au Niger de se retrouver ensemble pour le contrôle. Les autorités béninoises veulent qu’on n’y soit pas et c’est la raison pour laquelle elles ont interpellé les représentants nigériens et les ont mis aux mains de la police en laissant les chinois, les autres partenaires libres de leur mouvement », a conclu le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux.
Hamissou Yahaya (ONEP)