La pluie est attendue avec impatience par les habitants de Niamey, qui souffrent de la chaleur humide depuis plusieurs semaines. Mais quand elle tombe, elle apporte un nouveau problème : comment circuler dans certaines rues de la capitale nigérienne, à pied ou en véhicule, sans se retrouver bloqué ou trempé ? C’est ce qu’a vécu beaucoup de travailleurs et de citoyens de la capitale le lundi 12 juin 2023 lorsqu’ils rentraient à la maison.
À environ 300 mètres du rond-point Francophonie la route était transformée en un véritable lac, où l’eau stagnait sur plusieurs centimètres de hauteur. La circulation était extrêmement lente et chaotique. Les véhicules avançaient à pas de tortue, en évitant les nids-de-poule et les flaques d’eau. Certains étaient noyés à moitié ou tombaient en panne. Les piétons n’avaient pas d’autre choix que de marcher dans l’eau boueuse ou d’attendre sur les trottoirs bondés. Les motocyclistes et les piétons s’adonnent à de rudes acrobaties pour éviter de se faire asperger d’eau sale.
Dès qu’une grosse pluie tombe à Niamey, il est difficile de trouver un quartier de la Capitale où la circulation routière est fluide. Ce qui oblige certains conducteurs à prendre des raccourcis. C’est le cas de Moussa Amadou, un commerçant qui revenait du marché à bord de sa voiture chargée de marchandises. «J’ai essayé de passer par une rue qui me semblait moins inondée, mais je me suis trompé. L’eau est montée jusqu’au capot et le moteur s’est arrêté. J’ai dû abandonner ma voiture et appeler un ami pour qu’il vienne me chercher avec sa moto», raconte-t-il avec un air épuisant. Moussa ne sait pas encore si sa voiture est réparable ni combien cela va lui coûter. Il craint aussi que ses marchandises soient abîmées par l’eau.
Un peu plus loin, certains étaient éclaboussés au passage des voitures ou des motos qui roulaient trop vite. Les caniveaux d’évacuation des eaux de pluie étaient débordés ou bouchés par les déchets solides provenant des ménages environnants. «Je suis étudiant et je vais à l’université à pied tous les jours. Hier soir, en rentrant chez moi, j’ai été éclaboussé par une moto qui passait à toute vitesse dans une flaque d’eau. J’étais trempé et sale. J’ai eu peur de tomber malade à cause de l’eau contaminée. Je trouve que c’est irrespectueux et dangereux de conduire comme ça. Vraiment c’est un calvaire de se déplacer à Niamey après la pluie. Il faut compter deux ou trois fois plus de temps que d’habitude pour aller au travail ou à la maison», témoigne Abba qui déplore le manque de civilité de certains conducteurs qui ne respectent pas les piétons.
A côté de ce spectacle, des enfants jouaient à la baignade dans de l’eau stagnée sur l’une des double voies communément appelée 100 mètres. Ils s’amusaient à plonger dans l’eau ou à faire des concours de vitesse. Ils ne se rendaient pas compte des risques qu’ils couraient de se faire renverser par un véhicule, d’attraper des maladies infectieuses ou parasitaires, ou encore se blesser avec des objets coupants ou pointus cachés sous l’eau.
Les inconvénients de l’eau de pluie sur les routes sont nombreux pour les véhicules et les piétons. L’eau peut endommager le moteur, le système électrique, les freins ou les pneus des véhicules. Elle peut aussi provoquer des accidents de la circulation, en réduisant la visibilité et l’adhérence au sol. Pour les piétons, l’eau peut causer des glissades, des chutes, des entorses ou des fractures. Elle peut aussi favoriser la propagation de maladies comme le paludisme ou le choléra. «Depuis que la pluie a inondé les routes, je n’arrive plus à circuler normalement. L’eau a endommagé mon moteur, mes freins et mes pneus. Je dois faire des réparations coûteuses et je perds des clients. C’est une catastrophe pour mon activité.», confie un taximan.
Les inondations sont un problème récurrent à Niamey, qui s’aggrave avec le changement climatique. La ville, située au bord du fleuve Niger, est exposée aux crues du fleuve et aux écoulements intenses qui surviennent pendant la saison des pluies, entre juin et septembre. La croissance démographique et l’urbanisation anarchique ont également contribué à réduire les capacités de drainage naturel et à augmenter les risques d’inondation. Selon le gouvernement nigérien, les inondations ont fait 35 morts et plus de 26.500 sinistrés depuis le début de l’année 2022. En 2020, le bilan était de 71 morts et plus de 350.000 sinistrés.
Face à cette situation, les autorités ont mis en place des mesures d’urgence, comme la distribution d’aide humanitaire aux victimes, la construction de digues et de canaux, ou la sensibilisation des populations aux gestes de prévention. Mais ces mesures sont insuffisantes pour faire face à l’ampleur du phénomène. Il faudrait également renforcer la prévision météorologique, améliorer l’aménagement urbain, protéger les zones humides et les forêts, et développer des stratégies d’adaptation au changement climatique. C’est le défi que doit relever Niamey pour assurer la sécurité et le bien-être de ses habitants.
Ali Amadou Moustapha (Stagiaire)