Cette organisation repose sur la création d’une unité de soins intensifs neuro-vasculaire (USINV) et d’une unité neuro-vasculaire (UNV) à l’Hôpital Général de Référence de Niamey avec des équipes pluri professionnelles spécialisées dans le diagnostic, le traitement et la rééducation précoce des patients atteints d’un AVC. Il s’agit de la kinésithérapie, de l’ergothérapie, et de l’orthophonie. Selon Dr Zakaria Mamadou, chef du service de neurologie les données scientifiques ont démontré que la prise en charge d’un patient dans une filière améliore l’ensemble des aspects de sa prise en charge grâce à la multiplicité de solutions thérapeutiques déployées.
Il explique davantage qu’une filière de prise en charge des AVC est une cellule bien structurée qui facilite la prise en charge rapide et efficace des patients victimes d’AVC. Dr Zakaria Mamadou indique que des études ont montré de nombreuses défaillances multifactorielles dans la réponse aux patients et des systèmes pré́-hospitaliers dans les pays développés : déficit de reconnaissance des symptômes, absence de perception de la gravité des signes, défaillance concernant les actions à entreprendre. De ce fait, « il est plus que nécessaire de s’organiser en filière de prise en charge qui va intégrer chaque acteur dont le patient mais aussi la population au sein d’une organisation bien structurée », fait-il remarquer.
Le choix de l’Hôpital Général de Référence pour abriter cette filière n’est pas fortuit. En effet, c’est un hôpital moderne qui répond aux critères internationaux. L’hôpital dispose d’un service de neurologie de 27 lits, dont 5 sont dédiés aux soins intensifs neuro-vasculaires. L’hôpital est aussi doté́ d’un service d’imagerie médicale avec un scanner et une IRM avec accessibilité́ au scanner H24. Il y’a un service d’accueil des urgences de haut niveau avec accessibilité́ à un laboratoire de biologie médicale. L’hôpital dispose aussi d’un service de cardiologie, d’échographie trans-thoracique (ETT). L’hôpital est également équipé́ d’un appareil de coronographie. C’est d’ailleurs le seul au Niger. « Cette salle de coronographie est déjà̀ utilisée par notre équipe pour la réalisation des artériographies cérébrales diagnostiques et elle pourrait réaliser des cas de thrombectomie mécanique à la phase aiguë des AVC », explique Dr Zakaria Mamadou, chef du service de neurologie.
L’Hôpital Général de Référence dispose d’un service de réanimation avec une grande capacité́ d’accueil. C’est aussi le seul hôpital au Niger doté d’un service de MPR (médecine physique et de réadaptation) avec un médecin spécialiste et des kinésithérapeutes. Étant donné que c’est un projet pilote, l’expérimentation sera extrapolée dans les autres hôpitaux du Niger afin de sauver plus de vies, a dit Dr Zakaria Mamadou.
Prise en charge des AVC avant l’idée de la création de l’Unité de soins intensifs
À cette date, les patients nigériens ne bénéficient pas de la prise en charge à la phase aiguë : thrombolyse intraveineuse, et la thrombectomie mécanique. « Mais nous avons pu réaliser deux cas isolés de thrombolyse intraveineuse chez des patients dont le dernier cas date de mars 2022 », a fait savoir Dr Zakaria Mamadou.
Actuellement la prise en charge se fait dans les services de neurologie classique et il s’agit de prévenir les complications liées au décubitus prolongé (infections urinaire et respiratoire, les plaies du décubitus appelées escarres, la formation des caillots dans les veines des membres inférieurs…) et les autres facteurs pouvant aggravés le tableau neurologique. Il s’agit aussi de faire les bilans complémentaires pour chercher la cause de l’AVC afin de mettre un traitement pour prévenir les récidives. Aussi il y’a la prise en charge rééducative qui se fait très précocement en collaboration avec le service de médecine physique et de réadaptation.
Les avantages de l’unité neuro-vasculaire
D’après le Docteur Zakaria Mamadou, de nombreuses études scientifiques ont démontré les avantages des UNV. Il s’agit de donner aux patients les plus grandes chances de survie et de récupération. Il rapporte que des études ont démontré que l’hospitalisation dans une unité neuro-vasculaire améliore le pronostic vital et fonctionnel des patients victimes d’un AVC. L’effet favorable de l’unité est sans doute en partie dû à la prise en charge standardisée et spécialisée des patients, permettant ainsi des diagnostics plus précis et plus précoces, des investigations plus appropriées et une meilleure prévention des complications.
Dr Zakaria Mamadou indique par ailleurs que le projet de création de l’unité de soins intensifs en vue d’améliorer la prise en charge des AVC au Niger est présenté au Chef de l’État, Mohamed Bazoum qui a fait une appréciation positive du projet en instruisant le ministre en charge de la Santé Publique et celui des Finances pour mettre à disposition de l’Hôpital Général de Référence les moyens nécessaires pour la réalisation dudit projet afin de sauver plus de vies nigériennes. Une fois réalisé, le projet fera du Niger le 3ème pays d’Afrique sub-saharienne francophone à s’en procurer après le Congo Brazzaville et le Gabon, donc le premier en Afrique de l’ouest francophone.
La rééducation dans la prise en charge des patients victimes d’AVC selon Dr Alfari Abdoul Aziz, médecin rééducateur
La rééducation, explique Dr Alfari Abdoul Aziz, c’est l’utilisation de l’ensemble des techniques manuelles, instrumentales, des appareillages, des procédés et des médicaments en vue de restaurer partiellement ou totalement les capacités et fonctions perdues par le patient. L’objectif de cette rééducation est de prévenir la formation des escarres, la coagulation du sang dans les vaisseaux, les problèmes de déglutition, les infections, l’enraidissement des articulations et la perte totale de l’autonomie. La rééducation des patients victimes d’AVC comprend 3 phases, ajoute-t-il.
La Phase aigüe (1 à 2 semaine). À cette étape, la rééducation doit être précoce, intense mais prudente pendant l’hospitalisation du patient aux urgences, ou en réanimation ou en neurologie. La phase de récupération commence à partir de 2 à 3 semaines. C’est la phase pendant laquelle le patient est transféré dans un service de médecine physique et de réadaptation pour continuer la rééducation et les autres soins standards. Ce n’est pas le moment pour le malade se retourne à son domicile. Dans cette phase les thérapeutes travaillent les fonctions telles que : la station débout, la marche, la parole, ils corrigent aussi les problèmes des urines, de l’alimentation, du comportement et traitent les douleurs et insomnies. La durée de cette hospitalisation peut aller jusqu’à 3 mois afin d’obtenir une récupération fonctionnelle maximale. « Malheureusement à l’heure actuelle, au Niger, nous ne disposons pas encore de service d’hospitalisation de ce type, d’où, après la phase aigüe les malades se retrouvent à leurs domiciles », souligne Dr Alfari Abdoul Aziz
La Phase de réadaptation commence à partir de 1 à 2 ans du début de l’AVC. Les signes qui persistent encore sont difficiles à récupérer on parle alors de la phase séquellaire. Pendant cette phase, le suivi consiste d’une part, à apprendre au patient et à son entourage à faire des exercices d’auto rééducation quotidienne à domicile et aussi, lui faciliter la réalisation d’ activités socio professionnelles par la prescription d’aides techniques adaptées ainsi que l’aménagement de leurs milieux physiques. Pour leur suivi à long terme, des consultations de suivi et la prescription de séances de rééducation sont possibles tous les 3 ou 6 mois.
En conclusion, soutient-il, pour atteindre cet idéal de prise en charge de rééducation des personnes victimes d’AVC et d’autres maladies pouvant causer de lourds handicaps, à ce jour, a-t-il noté, le Niger compte seulement 2 médecins rééducateurs, dont 1 à l’hôpital Général de Référence de Niamey et l’autre à l’hôpital national de Niamey.
Dr Oumarou Mahamane Mamane Nassirou, médecin urgentiste salue le projet de création d’une unité de soins intensifs de prise en charge des AVC à l’Hôpital Général de Référence
« L’accident vasculaire cérébral (AVC) est un problème majeur de santé publique à l’origine d’une forte mortalité et d’handicap. L’AVC est une urgence diagnostique et thérapeutique d’où l’intérêt de disposer d’une filière organisée au sein de notre hôpital de prise en charge des patients qui en sont victimes.
Le service d’urgence est souvent le premier contact des patients avec l’hôpital et donc un maillon essentiel de diagnostic précoce de tout patient suspect d’AVC afin de l’orienter rapidement vers l’unité neuro-vasculaire. En plus notre service dispose d’une salle de déchoquage permettant de surveiller et de prendre en charge les patients graves en attente d’une prise en charge neuro-vasculaire. Vivement l’installation de cette filière de prise en charge de l’’AVC pour le bien-être de nos patients », témoigne Dr Oumarou Mahamane Mamane Nassirou.
Par Oumar Issoufou(onep)