Les exhausteurs de goût appelés arômes, ces petits cubes utilisés pour donner de la saveur et relever le goût des sauces, notamment dans la cuisine, sont des produits fortement utilisés par la femme nigérienne tantôt de manière modérée, tantôt de manière excessive. L’utilisation en excès de ces produits peut entraîner des conséquences graves sur la santé des populations.
Emballés avec des couleurs vives pour attirer l’attention, les bouillons insdustriel communément appelés arômes, sont des produits fortement consommés par la population, ils sont en abondance sur les différents marchés de la place. On y trouve pour tous les goûts et toutes les sauces avec des prix qui varient de 25 f à 75 f. Les bouillons sont des exhausteurs de goût capables de rehausser et à renforcer la saveur ou l’odeur des mets.
En effet, les principaux ingrédients d’un bouillon sont, entre autres, le sel, la maltodextrine, les exhausteurs de goût (glutamate, guanylate, inosinate ou extrait de levure), l’huile, les arômes, les extraits de viande et du poisson, les légumes et le sucre.
Grossiste au marché de Yantala, Moussa Issaka explique que les arômes proviennent des pays de la sous-région comme la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Nigeria, le Togo, l’Algérie. Ils sont fabriqués dans des pays comme la Chine, l’Inde, l’Italie et l’Allemagne. « J’achète des cartons que je revends à 1500f le paquet, les arômes sont des produits très prisés d’où leur forte demande par la population. Par jour, je peux vendre 4 à 6 cartons. Toutefois, nous rencontrons des difficultés à l’importation. La fermeture des frontières, et les convois qui prennent du temps avant d’arriver, mais Dieu merci je trouve mon compte », dit-il.
Farouk Ousseini est revendeur ambulant de bouillons et d’épices au marché wadata, qui s’approvisionne à Wadata auprès des grossistes. « J’achète le paquet d’arome à 1500 f avant de sillonner le marché à la recherche de clientèle. Généralement ce sont les femmes qui achètent le plus. Quelques rares fois, des hommes en achètent aussi. Je vends l’unité à 25 f, voire 75 f selon les variétés. Il y a aussi pour 500f à raison de 20 unités attachées dans des sachets. Dans la journée, je peux vendre 3 à 6 paquets, et je gagne un bénéfice de 2500 à 3000 f, par fois moins que ça », ajoute-t-il.
Mme Zara est une consommatrice de bouillons qui est venue au marché faire son panier. Elle affirme que, de nos jours, l’on assiste à des maladies très fréquentes causées par la consommation des arômes. Malheureusement, ajoute-t-elle, nous sommes habitués à utiliser ces produits qui nous causent des problèmes de santé. « Il y a longtemps que j’essaie d’arrêter d’en consommer, mais je n’y arrive pas », a-t-elle ajouté.
« Quand je me suis mariée, j’utilisais 2 cubes dans mes cuissons et ça donnait un goût trop fort, et mon mari et ma belle-famille appréciaient beaucoup mes repas. Quand j’ai voulu diminuer la quantité, je vous assure ça n’a pas été facile, mes plats sont devenus dégoûtants ». « Aujourd’hui, Dieu merci, nous sommes habitués à ce petit morceau de cube et nous savourons nos plats », témoigne une autre femme.
M. Abdoul Aziz souligne qu’il a du mal à manger dehors parce que les plats sont cuisinés avec divers arômes. Il attire l’attention des femmes sur leur utilisation et leur consommation avec modération. Il préconise même aux femmes d’arrêter leur consommation.
Pour éviter ou remplacer les bouillons, il existe des épices naturels et des herbes aromatiques qui varient d’une culture à une autre, des produits qu’utilisent nos grands-parents auparavent : le poisson séché, les crevettes, le soumbala, le sel, le poivre, le curry, le gingembre, l’akpi, le persil, le céleri, etc.
D’après Dr Abdoul Razak, biochimiste, nutritionniste diététicien, ces arômes ne respectent pas le principe du programme ‘‘codexe alimentarus’’ de l’ONU, et les normes en matière de l’étiquetage. « Il n’y a aucune information du point de vue constitutionnel, c’est à dire la composition de ces arômes. Il y’a juste le nom du produit, alors que la norme veut qu’on soit informé sur ce qu’on consomme. La manière dont ces arômes sont présentés laisse à désirer et ça ne reste pas sans conséquence en termes de santé publique », dit-il.
Evoquant les risques liés à la consommation de ces arômes, Dr Abdoul Razak a noté la perturbation du système endocrinien et le disfonctionnement de la régulation des hormones thyroïdiennes en particulier. « Le problème ici est lié à l’iode contenu dans ces produits et le sel (NaCl). En effet, l’iode est indispensable pour le fonctionnement des hormones thyroïdiennes. La quantité journalière recommandée est de 150 à 200microgrammes/j. Les 60% sont tous de même éliminés dans l’urine ; ce sont les 40% qui sont utilisés par la thyroïde, plus précisément au niveau du cou (au niveau du pharynx). L’iode est oxydé par TPO thyroperoxydase après plusieurs réactions métaboliques, le résultat donne la T3 et T4 et des rT3 et T 4 libre (ce sont les hormones thyroïdiennes ou thyroglobulines) », a souligné le médecin.
Il a ajouté que les hormones de la thyroïde jouent plusieurs rôles. Il s’agit, entre autres, de l’accélération du métabolisme de base, la dégradation et du stockage des nutriments au repos ; la consommation d’oxygène ; la stimulation des récepteurs betas adrénergiques du cœur, des muscles et du tube digestif ; la régulation de la température ou thermogenèse alimentaire ; la maturation du système nerveux central ; l’apparition des points d’ossification chez le nouveau-né et sa croissance. « Alors, la consommation de ces arômes peut perturber toutes ces fonctions dans l’organisme, ce qui fait que le problème des arômes dans l’organisme est multiforme et tout cela est dû au fait que les arômes nous apportent plus de sel et iode qu’on en a besoin par jour », a indiqué Dr Abdoul Razak.
Halimatou Mahamadou (Stagiaire)